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19 octobre 2020 1 19 /10 /octobre /2020 06:37

Parmi toutes les messes dominicales de l’automne liturgique, celle-ci est certainement la plus recueillie, tout empreinte de la nostalgie du ciel et des douleurs de l’exil. L’âme se présente aujourd’hui comme une pauvre exilée dans la maison de Dieu ; elle reconnaît, avec les trois jeunes gens dans la fournaise de Babylone, qu’elle a mérité ses souffrances à cause de ses péchés (nous devons supporter toutes les amertumes de la vie en esprit de pénitence) ; mais elle aspire à la patrie, dont elle voit l’image dans le sanctuaire.

Le point culminant de toute la messe est le chant de l’Offertoire ; nous y trouvons l’expression de toute notre nostalgie céleste (espérance) : « Nous étions assis sur les bords des fleuves de Babylone et nous pleurions tandis que nous évoquions ton souvenir, Sion. »

 

Lisons le psaume 136 en entier. Il y a peu de psaumes dans tout le psautier qui puissent faire, à la première lecture, une impression aussi profonde que celui-ci. Ce psaume est une élégie saisissante :

Sur les bords des fleuves de Babylone nous étions assis et nous pleurions, tandis que nous évoquions ton souvenir, Sion.

Là, nous avions suspendu aux saules nos harpes.

Là, nos geôliers nous demandaient de chanter de joyeux cantiques ;

Nos oppresseurs nous harcelaient : « Chantez-nous un cantique de Sion ! »

« Comment chanterions-nous un cantique de Dieu sur une terre étrangère ? »

Si je viens à t’oublier jamais, Jérusalem, que ma droite se dessèche ;

Que ma langue s’attache à mon palais, si je cesse de penser à toi, Si Jérusalem n’est plus au premier rang de mes joies.

N’oublie pas, Seigneur, les cris qu’ont poussés les enfants d’Édom au jour du malheur de Jérusalem :

« Détruis-la, détruis-la jusque dans ses fondements ! »

Et toi, fille de Babylone, vouée au malheur, heureux qui te rendra ce que tu nous as fait ;

Béni celui qui saisira tes petits enfants, et les brisera contre les rochers.

Nous nous rendons en esprit à Babylone ; nous voyons, sur les bords de l’Euphrate une foule de Juifs qui se rassemblent pour prier. Nous voyons aussi les chantres qui exécutaient jadis leurs chants au Temple de Jérusalem pendant la célébration du service divin ; ils sont assis, tout tristes, au bord du fleuve (c’est là que les Juifs faisaient leurs ablutions avant la prière et, à l’étranger, ils priaient volontiers auprès d’un fleuve). Ils sont là pour commencer le service divin par un chant, un cantique de Sion, comme ils disent volontiers. Pourtant non, ils n’y parviennent pas. Muets de tristesse, les joues baignées de larmes, ils portent leur souvenir vers le Temple, vers la montagne de Sion à Jérusalem, et ils suspendent leurs harpes aux saules.

Les cantiques des Juifs étaient connus et célèbres au loin ; c’est pourquoi les habitants de Babylone harcèlent les captifs : « Chantez-nous donc un de vos beaux cantiques de Sion ! » Mais non, aucun Juif ne pouvait s’y résigner : « Comment pourrions-nous chanter un cantique de Dieu sur la terre étrangère, sur la terre d’exil ? » Puis l’un d’entre eux lève la main en signe de serment et s’écrie bien haut : « Si je t’oublie jamais, Jérusalem, que ma main se dessèche ; que ma langue s’attache à mon palais, si je ne me souviens pas toujours de toi, si Jérusalem n’est pas au premier rang de mes joies. » Et maintenant nous le voyons tendre le poing aux complices de ses ennemis, les Édomites, ses compatriotes qui ont excité les Babyloniens : « Détruisez donc Jérusalem de fond en comble ! ».

Puis le Juif tend les deux poings à Babylone et vocifère une terrible malédiction : « Béni celui qui saisira tes petits enfants et leur brisera la tête contre les rochers. » Tel est le contenu du psaume 136 que l’Église nous fait chanter aujourd’hui à la messe. Comment utiliser ce psaume pour notre prière ? Notre vie ressemble aussi à un exil. Le ciel est notre patrie, la terre est un lieu d’exil. Et en ce moment, pendant l’automne liturgique, l’Église nous invite justement à diriger tous nos désirs vers le ciel. Notre Jérusalem est la céleste Sion où nous serons unis pour toujours au Christ et à tous les saints. Alors nous devons avoir au cœur la même nostalgie que celle qu’ont exprimée dans leur psaume les Juifs exilés. Le psaume est donc le chant de notre nostalgie pour la céleste patrie. Amen

 

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12 octobre 2020 1 12 /10 /octobre /2020 06:55

   Ce dimanche nous présente une magnifique image de l’automne liturgique : Nous voyons une salle de festin brillamment éclairée, où sont assis de nombreux invités, revêtus d’habits d’une blancheur éclatante. Dans l’attente, tous portent leurs regards vers la porte qui doit s’ouvrir à tout instant pour laisser entrer le Roi venant rendre visite aux invités ; les invités, c’est nous, chrétiens ; la blanche robe nuptiale, c’est le vêtement baptismal de la filiation divine ; le roi qui arrive, c’est le Seigneur dont le retour est attendu. La grande préoccupation de notre vie doit être de posséder la blanche robe nuptiale ; c’est l’homme nouveau que nous devons revêtir dans la vraie justice et sainteté (Épître) ; c’est l’accomplissement de la volonté de Dieu (Oraison).

   Dans cette messe souffle bien l’esprit de l’Église antique : dans les souffrances et les afflictions extérieures, sous les blancs vêtements de la pureté, elle attend avec impatience le retour du Seigneur. Cette fois-ci, l’Introït présente une scène toute différente : A l’entrée dans l’église, le Christ vient à notre rencontre et nous adresse une parole de consolation, mais aussi l’avertissement suivant : « Ne soyez pas tristes si vous avez encore actuellement beaucoup à souffrir ; je suis avec vous, je suis votre Dieu et bientôt votre suprême bonheur. » Puis il lève le doigt en signe d’avertissement : « n’ayez qu’un souci ; gardez mes commandements ! ».

   Dans l’Évangile le Christ nous parle. L’allégorie de la robe nuptiale est avant tout un enseignement : Il ne suffit pas d’appartenir par la foi à l’Église (de prendre place dans la salle du festin), nous devons encore mener une vie conforme à la volonté de Dieu, revêtir par conséquent la robe nuptiale de la grâce. Les noces désignent l’œuvre du salut ; le Christ est l’Époux, l’Église est l’Épouse ; nous, chrétiens, nous sommes les invités. La visite du roi désigne le retour du Christ ; la robe nuptiale, la grâce sanctifiante. Il n’y a guère d’autre image qui puisse mieux que celle-ci caractériser notre vie chrétienne. Mais l’Évangile est aussi l’image de la messe du dimanche : la salle du festin brillamment éclairée, c’est la maison de Dieu dans laquelle l’assemblée des « invités aux noces » est maintenant réunie. La Sainte Eucharistie est le festin nuptial, à la fois image et gage du festin nuptial du ciel. Ici encore, le Roi apparaît et rend visite aux invités ; c’est la préfiguration de son futur retour. C’est ainsi que la parabole se réalise dans notre messe du dimanche. Toutes nos préoccupations doivent tendre à ne pas être des invités dépourvus de la robe nuptiale.

   Dans la parabole, il est question d’une noce que le roi célèbre pour son fils. Qu’est-ce que cela veut dire ? C’est l’œuvre du salut que Jésus-Christ a accomplie sur terre. Nous pouvons distinguer trois étapes de cette union du Christ avec l’humanité : la première est son incarnation et sa naissance ; l’humanité s’est alors unie à la divinité dans la personne du Verbe Divin ; la seconde suivit sa mort sur la croix ; par elle le Christ a objectivement racheté l’humanité et l’a ainsi unie à Dieu ; la rédemption s’applique subjectivement à chacun par le baptême et le pardon de ses fautes. Par la grâce de la filiation divine, le Verbe s’unit avec l’âme de l’enfant de Dieu. La troisième étape, c’est l’union définitive de l’Église et de l’âme avec l’Époux divin dans le ciel.

   Mais le roi arrive pour rendre visite aux invités. C’est une figure du retour du Seigneur, pour chacun à l’heure de la mort, pour tous au jugement dernier. Seul, alors, sera reçu celui qui sera trouvé revêtu de la robe nuptiale de la grâce baptismale ; quiconque en sera dépourvu entendra de la bouche de l’éternel Juge l’arrêt de condamnation. Le temps après la Pentecôte peut être brièvement caractérisé comme ceci : le temps où l’Église se préoccupe de sauvegarder la pureté de la robe nuptiale.

   Chaque dimanche, l’Église évoque le baptême et la fête de Pâques ; chaque dimanche, elle purifie, à l’Asperges, la robe nuptiale ; et, à la messe du dimanche, l’Eucharistie est le grand moyen de préservation et de purification de la robe nuptiale (mundet et muniat). Inlassablement l’Église avertit les chrétiens d’avoir à dépouiller le vieil homme et à se revêtir de l’homme nouveau dans la justice et la sainteté, et prie à cette intention.

   Actuellement, le grand souci de notre mère l’Église est que ses enfants se présentent sans faute et sans châtiment à la venue du Seigneur. Amen

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5 octobre 2020 1 05 /10 /octobre /2020 06:53

    En ce mois d'octobre, l'Église honore plus particulièrement Marie comme celle qui nous obtient les victoires dans les situations les plus difficiles. Déjà, au temps de saint Dominique, en 1213, c'est grâce au Rosaire que fut gagnée la bataille de Muret, menée par Simon de Montfort contre l'armée albigeoise (c'est-à-dire la dangereuse hérésie cathare). C'est encore par la prière du Rosaire que le pape St Pie V a obtenu la victoire sur les Turcs à Lépante, le 7 octobre 1571. Et c'est pourquoi il a institué à cette date la fête du très Saint Rosaire, appelée encore Notre-Dame des Victoires. Par le Rosaire encore, le pape Innocent XI obtint en 1683 la délivrance de Vienne de la menace de l'Islam. Par le Rosaire, une autre victoire fut encore gagnée contre les Turcs devant Belgrade en 1716, et c'est ce qui décida le pape Clément XI à étendre la fête du St Rosaire à l'Eglise universelle. Par le Rosaire, Saint Louis-Marie Grignion de Montfort forma l'âme chrétienne de la Vendée (18ème siècle). C'est encore la prière du Rosaire que la Vierge de Fatima, en 1917, a demandée avec instance pour sauver les âmes de l'enfer. La victoire de la Marne, pendant la première guerre mondiale (18- 07-1918), a été reconnue comme une victoire de Notre-Dame. Une autre victoire encore a été gagnée grâce à la récitation du Rosaire, c'est la délivrance de l'Autriche de la menace communiste, en 1947. Et pour la France même message lors de l’apparition à l’Île Bouchard, du 8 au 14 décembre 1947. Aussi sainte Thérèse disait : Par le Rosaire, on peut tout obtenir. Selon une gracieuse comparaison, c'est une longue chaîne qui relie le Ciel et la terre : une des extrémités est entre nos mains et l'autre dans celles de la Sainte Vierge. Tant que le rosaire sera récité, Dieu ne pourra abandonner le monde, car cette prière est puissante sur son cœur. Elle est comme le levain qui peut régénérer la terre. La douce Reine du ciel ne peut oublier ses enfants qui, sans cesse, chantent ses louanges. Aussi l'Eglise nous invite-t-elle à aller le réciter chaque soir, en ce mois d'octobre, devant Jésus réellement présent et exposé sur l'autel. Le mois d'octobre est là. Avec lui l'Eglise appelle ses enfants pour qu'ils récitent en commun les belles prières du Rosaire. Le soir, au moment où la nature fatiguée va s'endormir, les cœurs semblent reprendre une nouvelle énergie pour célébrer les louanges de la Reine du Ciel. "Je suis Notre-Dame du Rosaire" (Fatima, 13 octobre 1917) A chacune de ses six apparitions, notre Mère du Ciel a tenu à répéter sa demande, toujours dans les mêmes termes, avec la même insistance : "Récitez le chapelet tous les jours !" C'est dire à quel point cette prière plaît souverainement à son Cœur de Mère. La Vierge de Fatima vient nous révéler que le chapelet, loin d'être une dévotion tout à fait secondaire et facultative, est la condition la plus ordinaire pour obtenir infailliblement toutes les grâces que nous lui demandons. Oui, elle est la Médiatrice de toutes grâces, de par le bon plaisir de son Fils. Si, de même qu'à Lourdes, elle voulut apparaître à la Cova da Iria tenant à la main cet instrument béni, guide de notre prière, c'était pour nous montrer qu'il était le plus sûr moyen, parce que le plus facile, le plus humble, pour gagner son Cœur et obtenir ses grâces.

   Léon XIII (1801-1903), surnommé « le pape du Rosaire », disait : « Le Rosaire est l'expression la plus accomplie de la piété chrétienne ». « [...] entre les diverses formules et manières d'honorer la divine Marie, il en est qu'il faut préférer, puisque nous savons qu'elles sont plus puissantes et plus agréables à notre Mère; et c'est pourquoi Nous Nous plaisons à désigner en particulier et à recommander tout spécialement le Rosaire. » Pie X (1835-1914) : « Le Rosaire est, de toutes les prières, la plus belle, la plus riche en grâces, celle qui touche le plus le Cœur de la Mère de Dieu [...] Si vous voulez que la paix règne dans vos foyers, récitez-y le chapelet en commun ». Pie XII (1876-1958) : « Nous estimons que le Saint Rosaire est le moyen le plus efficace et le meilleur pour obtenir l'aide maternelle de la Vierge ». « La récitation même de formules identiques, tant de fois répétées, loin de rendre cette prière stérile et ennuyeuse, possède au contraire l'admirable vertu d'inculquer la confiance à celui qui prie et de faire une douce violence au Cœur maternel de Marie. » Oui, Ainsi soit-il !

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28 septembre 2020 1 28 /09 /septembre /2020 06:46

« Qu’est-ce qu’on pourra bien dire de sœur Thérèse de l’Enfant-Jésus ? Elle n’a rien fait ! »

   Par ces paroles, une religieuse carmélite se demandait ce que la Mère Prieure allait bien pouvoir raconter dans la notice biographique, traditionnelle au Carmel, que l’on écrirait sur cette moniale insignifiante qui était en train d’agoniser dans l’infirmerie du Carmel de Lisieux pendant l’été 1897. « Elle n’a rien fait » 

   Enfant du Père, Thérèse « n’a rien fait », comme un zéro. Le chemin de vie de Thérèse n’est-il pas en effet une longue descente vers ce zéro dont elle parle dans l’une de ses lettres au Père Roulland : « Travaillons ensemble au salut des âmes ; moi je puis faire bien peu de chose, ou plutôt absolument rien si j’étais seule, ce qui me console c’est de penser qu’à vos cotés je puis servir à quelque chose ; en effet le zéro par lui-même n’a pas de valeur, mais placé près de l’unité il devient puissant, pourvu toutefois qu’il se mette du bon côté, après et non pas avant !… C’est bien là que Jésus m’a placée et j’espère y rester toujours, en vous suivant de loin, par la prière et le sacrifice » (LT 226). Être un zéro… cette expression peut être redoutable si elle est mal interprétée. Mais il ne s’agit pas pour Thérèse de complexe d’infériorité, de soif morbide d’anéantissement, de masochisme, ni de peur de l’engagement. Non, ce n’est pas cela. Mais voyons, Thérèse était carmélite ! Et qu’est-ce qui fait le fond de la vie au Carmel ? L’oraison et la vie fraternelle. Et est-ce que ce ne sont pas précisément deux lieux où nous pouvons rapidement expérimenter que nous sommes des zéros, voire même des triples zéros ? Nous ne savons pas prier, si l’Esprit de Dieu ne vient pas à notre secours et prier lui-même en nous, en criant : « Abba, Père ! » Nous ne savons pas aimer les autres comme le Seigneur le désire si nous ne recourons qu’à nos forces humaines.

   Nous ne savons pas faire, mais il faut y consentir, tout au long de nos vies, et « voilà le difficile : il faut consentir à rester pauvre et sans force », comme l’écrit Thérèse dans une autre de ses lettres (LT 197). Dans l’humble quotidien de sa vie de carmélite, Thérèse a découvert qu’être un zéro, ce n’était pas forcément être un nul. Dans la lumière de Jésus, c’est bien plutôt être du nombre de ces tout-petits auxquels le mystère du Royaume est révélé : « Personne ne connaît le Fils, sinon le Père, et personne ne connaît le Père, sinon le Fils et celui à qui le Fils veut le révéler ». Et – c’est encourageant pour nous ! – c’est dans ses derniers écrits qu’elle nous en livre le secret : « Seigneur, vous savez bien que jamais je ne pourrais aimer mes sœurs comme vous les aimez si vous-même, ô mon Jésus, ne les aimiez encore en moi », et un peu plus loin : « [Votre amour] est un abîme dont je ne puis sonder la profondeur… pour vous aimer comme vous m’aimez, il me faut emprunter votre propre amour, ô Jésus ».

   Nous ne savons pas faire, mais il nous faut y consentir. Consentir à ne pas arriver par nos propres forces à faire ce que nous avons à faire, même ce à quoi nous sommes appelés ou à quoi nous nous sommes engagés. Consentir à dire "oui" à l’œuvre de Dieu en nous, comme Jésus, dont l’existence tout entière a été un « oui » au Père, jusqu’à la croix : « Oui, Père, tu l’as voulu ainsi en ta bonté… », « Oui, mon fardeau est léger… ». C’est ce qu’a fait Thérèse à son tour, à la suite de Jésus, à travers toute chose : à travers les joies et les lumières du quotidien, à travers aussi les larmes et le sang… Dire « oui » au Père avec Jésus, pour recevoir la grâce d’être configuré à la ressemblance du grain de blé tombé en terre – un zéro, d’une certaine façon – qui, s’il meurt, porte beaucoup de fruit.

    Qu’est-ce qu’on pourra bien dire de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus ? Elle n’a rien fait… que dire "oui" à la volonté et l’œuvre de Dieu en elle. Qu’elle nous obtienne cette même grâce. Amen.

 

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20 septembre 2020 7 20 /09 /septembre /2020 17:54

   Dimanche dernier le thème de Pâques était inclus dans l’image de la résurrection du fils de la veuve de Naïm; ici, il se retrouve dans l’image de l’hydropique. Là, l’Église nous adressait une exhortation sur le « renouvellement dans l’Esprit » ; ici, elle prie pour l’affermissement intérieur des chrétiens. Si nous voulons une pensée d’ensemble, ce sera celle-ci : la guérison de l’âme malade.

   Le ciel est sombre : persécutions et tentations pèsent lourdement sur le Christ mystique ; dans la messe précédente, le soleil avait bientôt percé ; aujourd’hui, les nuages demeurent jusqu’à la fin ; une seule fois (au Grad. et à l’Allel.), le soleil essaie de se montrer. Dans la nature également, l’automne a fait son apparition ; les jours deviennent plus courts, les nuits plus longues ; c’est pour les âmes le symbole de la nuit et des persécutions.

   La messe commence par un Appel saisissant : c’est le Christ mystique, avec son corps et ses membres, qui prie : un appel à la pitié en faveur des âmes malades ; trois motifs de prière : a) Tout le long du jour, l’Église prie (à l’office des Heures) ; b) Dieu est « bon, clément et riche en miséricorde » ; c) l’âme est « si pauvre et misérable ». Alors elle a besoin d’une grande grâce ; celle-ci doit être le guide de sa route (un peu comme l’étoile des Mages) et sa compagne de voyage (comme Raphaël, le compagnon de Tobie) sur le chemin de la vie (Or.), alors seulement elle produira de « bonnes œuvres ». – D’un cœur aussi attendri que saint Paul dans sa prison, notre mère l’Église nous invite et nous exhorte à la perfection ; il y a dans l’Épître une chaleur inaccoutumée ; trois prières : 1) Puissions-nous faire croître toujours de plus en plus en nous l’homme intérieur (c’est-à-dire supérieur) ; 2) Puisse le Christ habiter par la foi dans nos cœurs, et 3) Puissions-nous établir solidement nos racines et nos fondations dans l’amour (l’amour est la racine de l’arbre, la fondation de l’édifice de l’âme) ; alors nous saisirons de plus en plus profondément toute l’étendue de l’œuvre de salut. Le Cœur de l’Église (de saint Paul) est si plein qu’elle aspire à trouver les mots capables d’exprimer comme il faut l’amour de Dieu et sa grâce : « Alors vous comprendrez aussi l’amour du Christ qui surpasse toute science, et vous serez remplis de toute la plénitude de Dieu. » Ainsi une vie abondante et riche en grâce, voilà ce qui préoccupe l’Église pour nous. L’Épître s’est terminée sur ces deux mots : Gloire à Dieu dans l’Église et dans le Christ.

   Ensuite apparaît dans le Graduel la vision de la parousie ; oui, toute plénitude sera réalisée quand le Christ, à son second avènement, rassemblera autour de lui tous les rois, quand la « céleste Sion », l’Église maintenant persécutée, sera réédifiée, telle une épouse dans tout l’éclat de sa parure, et quand le Seigneur se montrera à tous les regards dans sa majesté rayonnante. Alors régnera la joie pascale, pleine et exultante ; alors l’Église chantera le « cantique nouveau » de la Rédemption, l’Alléluia.

   L’Évangile est celui de la parabole dite du festin ; il nous présente deux pensées : 1. Jésus, le Sauveur, est le médecin des âmes malades ; c’est là précisément le travail dominical du Christ.

2. L’humilité est la voie qui conduit à la guérison ; ce n’est pas sans raison que l’Église nous enseigne encore une fois cette vertu ; c’est la vertu fondamentale, le remède. Le festin du sabbat est l’image du banquet eucharistique de la messe du dimanche, dans lequel le Christ veut nous guérir de l’hydropisie de l’esprit du monde, nous instruire (avant-messe), nous nourrir d’un aliment divin (sacrifice de la messe). A l’Offertoire, conformément au caractère grave de la messe, nous nous préoccupons de porter à l’autel les besoins de notre âme. Par deux fois, avec une ardeur croissante, l’Église implore du secours. Le développement de l’offertoire, avec la triple répétition de son verset, est particulièrement énergique : « Seigneur, voyez à me secourir. »

   Aussi, à la communion, l’Église n’entonne-t-elle pas un chant eucharistique ; elle remercie Dieu de sa bienveillante conduite envers nous au temps de notre jeunesse et projette un regard plein d’anxiété sur l’époque de notre vieillesse. Puisse-t-il nous accompagner aussi pendant la vieillesse ; la Sainte Eucharistie est le véritable viatique. La Communion déroule toute une histoire de la vie : Le Seigneur est le Sauveur de notre enfance, de notre jeunesse, de notre âge mûr et de notre vieillesse. Amen

 

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14 septembre 2020 1 14 /09 /septembre /2020 06:52

   Notre diocèse, de par la volonté de notre évêque, entre aujourd’hui dans une année mariale.

On ne peut qu’encourager la dévotion à Marie, mais cette dévotion doit être éclairée, sous peine de devenir quelque peu superstitieuse.

   S’il ne faut pas se lasser de parler de Marie, selon l’expression de St Bernard, il convient de se rappeler aussi qu’aucun aspect du mystère chrétien ne peut être pensé indépendamment de son lien au Christ.

   Il est trop clair que la Vierge Marie a une relation absolument unique au Christ. Mais justement cette relation ne s’épuise pas dans le fait qu’elle ait été la mère physique du Sauveur. Nous le savons depuis St Augustin - probablement même bien avant ! - il n’eût été d’aucun profit à Marie d’avoir porté le Verbe de Dieu dans son corps, si elle ne l’avait reçu d’abord dans son cœur, dans son esprit par la foi. Il est plus grand pour elle d’avoir accueilli et gardé la Parole en son âme que de l’avoir nourri de son lait, comme le dit expressément le Seigneur lui-même dans l’Evangile.

   Et c’est ainsi - par le fait même d’avoir été graciée (remplie de grâce) - que Marie devient membre du grand corps des croyants de tous les temps que nous appelons l’Eglise, le Corps mystique du Christ. Mais comme elle a été graciée au degré suprême où une créature peut l’être après le Christ, du même coup elle se trouve occuper dans ce corps une place éminente qui lui assure les privilèges dont Dieu l’a comblée et que nous célébrons au fur et à mesure du déroulement liturgique.

   Comme en chacun de nous, la grâce est en Marie une grâce qui la conforme au Christ. Selon le mot de St Paul, « ceux que d’avance il a connus, le Père les a aussi prédestinés à être conformés à l’image de son Fils. » Cela veut dire que cette grâce produit chez chacun de ceux qui la reçoivent les mêmes dons de participation aux mystères qui se sont accomplis dans le Christ lui-même : à sa passion et à sa mort, mais aussi à sa vie en nous libérant déjà maintenant du péché, à sa résurrection, et finalement, à sa glorification. C’est la même grâce en Marie que chez nous, mais avec une différence considérable qui tient à la proximité sans égale de la Vierge par rapport au Christ. Là où chez nous, l’œuvre de la grâce ne s’accomplit qu’avec beaucoup de difficultés, elle atteint d’emblée en Marie un degré supérieur qui ne peut que se déployer sans heurts tout au long de sa vie. Là où nous aspirons encore dans l’espérance, Marie nous a déjà précédés dans la plénitude de la promesse réalisée.

   Avant l’Eglise, la Vierge est déjà sainte, parfaitement unie au Christ dès sa conception immaculée ; avant l’Eglise encore, elle jouit déjà de la gloire du Christ jusque dans son corps - c’est cela que nous célébrons en parlant de son assomption. Mais avec la Vierge, l’Eglise aussi est déjà sainte par la meilleure partie d’elle-même ; avec la Vierge encore, l’Eglise est déjà glorifiée avec le Christ. Quant à la sainteté, la Vierge réalise personnellement ce que l’Eglise est collectivement ; quant à la glorification, la Vierge est déjà personnellement ce que l’Eglise ne sera qu’à la fin des temps. C’est ainsi que Marie est pour nous simultanément un modèle à imiter et une image, une icône de ce que nous serons à notre tour. Suivant la belle expression d’une préface liturgique de la fête de l’Assomption, « elle est la parfaite image de l’Eglise à venir, l’aurore de l’Eglise triomphante ; elle guide et soutient l’espérance du peuple de Dieu encore en chemin ».

   Puisse Dieu nous accorder la grâce d’être fidèles à ce mystère qu’il veut accomplir en nous ! Amen.

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6 septembre 2020 7 06 /09 /septembre /2020 15:48

   C’est le temps de la moisson, alors que presque tous les habitants de Rome abandonnaient leurs sept collines et se transportaient aux environs pour y jouir de la campagne… C’est donc fort à propos que la liturgie dominicale vient à nouveau nous enseigner aujourd’hui une filiale confiance dans la divine Providence qui nourrit les oiseaux et revêt les fleurs des champs de splendides couleurs.

    « Vous êtes, ô Dieu, notre bouclier ; ah ! Regardez et contemplez la face de votre Oint » chante l’Introït. Voici le véritable motif pour lequel Dieu nous accorde ses faveurs. Il nous a prédestinés dans son Fils, et c’est en Lui et pour Lui qu’il nous aime, comme membres de son corps mystique. Gardons-nous donc de séparer ce que Dieu a uni. Si le Père éternel ne nous regarde point dans notre désolante personnalité, mais toujours en relation avec le Christ, pourquoi voudrions-nous nous enfermer dans un pernicieux égoïsme, et ne considérerions-nous pas plutôt continuellement ce que nous sommes dans le Christ ?

   Avec la collecte, nous confessons à Dieu notre extrême misère. Cette superbia vitae (superbe de la vie) qui forme l’orgueil des mondains est appelée aujourd’hui dans la sainte liturgie humana mortalitas, (humaine mortalité) laquelle, par conséquent, sans Dieu labitur, c’est-à-dire succombe à la misère, au mal. Nécessaire donc est la divine grâce pour la soulever et la soutenir. Et nous, aujourd’hui, nous l’implorons bien abondante, cette grâce, sur nous-mêmes et sur toute l’Église, afin qu’elle s’oppose comme un bouclier aux attraits du mal, que ceux-ci ne nous séduisent pas, et qu’elle nous pousse à faire notre salut moyennant des actes vertueux, méritoires pour la vie éternelle.

   Combien sont profondes, au point de vue théologique, ces collectes dominicales du Missel, et avec quel fruit la prière antique tirait son inspiration, plutôt que du sentiment, des sources très hautes de la doctrine révélée !

   Pour St Paul, la loi n’était qu’un frein contre les désirs charnels, — et l’Apôtre en énumère les diverses manifestations, — tandis que le chrétien est sous l’empire du Saint-Esprit, lequel au contraire produit dans l’âme des œuvres de pénitence, la charité, la bonté et la joie. A ces signes on peut facilement reconnaître de quel esprit chacun est animé. Quant à la marque générale de tous les amis du Christ, c’est la douleur et la souffrance, supportées avec joie pour son amour.

   La lecture évangélique de saint Matthieu (6, 24-33) exclut de l’âme toute possibilité de partage. On ne peut servir en même temps Dieu et les biens matériels, mais on doit avant tout rechercher le Seigneur au moyen de l’observance de sa loi, attendant de sa Providence tout ce qui sera vraiment nécessaire pour le bien-être du corps. Cela ne comporte point une certaine insouciance fataliste, laquelle, dans l’oisiveté du corps et de l’esprit prétend recevoir tout du Seigneur par miracle, mais modère seulement l’activité humaine et la contient dans les limites établies par Dieu, qui, tout en nous ordonnant de pourvoir à nos besoins à la sueur de notre front, nous défend de nous y attacher avec excès, comme si l’homme n’était que chair et matière, ou comme si la divine Providence n’existait pas. Le proverbe populaire exprime fort bien l’ordre juste des choses : aide-toi, le Ciel t’aidera.

   L’antienne pour la Communion est tirée de la lecture évangélique de ce jour. « Cherchez par-dessus tout le règne intérieur de Dieu dans l’âme moyennant la pratique intégrale des vertus propres à votre état. » — Voilà pourquoi la vertu est appelée ici justice.

En disant que celle-ci doit être notre premier soin, l’Évangile n’exclut pas — bien au contraire, il l’indique implicitement — que nous devions aussi rechercher ce qui est nécessaire ou utile pour soutenir notre vie matérielle. Il veut toutefois qu’en cette double recherche — si bien exprimée dans l’oraison dominicale — l’on conserve l’ordre établi : Dieu, l’âme et le corps. C’est notre devoir d’agir, de travailler : ce que nous ne parvenons pas à faire, Dieu l’accomplira. Les beautés de la nature, presque incompréhensibles pour une âme corrompue par la sensualité et par l’esprit du monde, les prairies verdoyantes, les nuances si délicates des fleurs, inspiraient les saints. Si Dieu aime à ce point les moindres herbes des prés et les plus petits insectes, qu’il a pourvu à leur vie grâce à un merveilleux organisme, combien plus ne prendra-t-il pas soin du chrétien, en qui II reconnaît l’image de Jésus son Premier-Né ? « Pense à moi et je penserai à toi », disait un jour le Seigneur à sainte Catherine de Sienne. Ayons confiance en Dieu, épousons les intérêts de sa gloire, et Il s’occupera de ceux de notre salut. Amen

 

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2 août 2020 7 02 /08 /août /2020 15:34

   Le Christ pleure sur Jérusalem.

L’Église nous présente, aujourd’hui, une image sinistre. C’est comme un phare dans la mer sombre de la vie, et ce phare doit nous préserver des écueils. Cette image offre une leçon, une idée directrice : il y a un enfer : l’âme élue, elle-même, peut être rejetée si elle ne vit pas de la foi. Les deux lectures ont ce trait commun qu’elles parlent toutes les deux de l’infidélité et de la réprobation du peuple élu que Dieu voulait sauver. Méditons pendant toute la semaine cette image saisissante : le Christ se tient debout et pleure devant les portes de la ville élue. La semaine a quelque chose de grave. Excitons en nous l’esprit de pénitence et répétons chaque jour la prière du Canon : « Arrache-nous à la damnation éternelle ».

   La messe a aujourd’hui — des textes instructifs ; elle contient — ce qui est une exception, le dimanche — un avertissement.

Le psaume d’Introït (ps. 53) décrit la vie chrétienne. Même après la conversion pascale, cette vie est un combat qui se terminera, il faut l’espérer, par la victoire, comme dans le psaume. Puisse le dimanche ressembler à l’antienne et sceller la victoire pascale ! La semaine, avec ses combats, ressemble au verset. — Nous sommes des enfants imprudents. Bien souvent nous demandons des choses qui nous seraient funestes.

   C’est pourquoi l’Église nous fait prier pour obtenir la grâce de ne demander que ce qui est agréable à Dieu (Or.). L’Église nous donne aujourd’hui un grave avertissement. Le baptême, la vocation, l’Eucharistie ne suffisent pas à nous assurer le salut. Toute l’histoire juive nous invite à nous tenir sur nos gardes. Le peuple élu a été rejeté, réprouvé.

   Saint Paul nous donne deux paroles qui doivent pendant toute la semaine nous avertir et nous consoler : pas de présomption, mais pas de découragement. « Que celui qui est debout prenne garde de tomber. Aucune tentation ne vous est survenue qui n’ait été humaine. Dieu est fidèle ; il ne permettra pas que vous soyez tentés au-dessus de vos forces, mais, avec la tentation, il vous ménagera aussi une heureuse issue afin que vous puissiez la supporter ».

   L’Évangile nous montre une scène impressionnante tirée de l’entrée de Jésus à Jérusalem, le dimanche des Rameaux. Jérusalem est l’image de l’âme baptisée qui repousse la grâce. Quel avertissement ! Jésus pleure ; le Créateur, le Juge pleure sur le péché et l’infidélité de sa créature ! Purifions donc le temple de notre âme.

A l’Offertoire, l’âme chante la seconde partie du psaume du dimanche (ps. 18) ; elle exprime ainsi ses impressions sur les graves lectures : je reconnais le temps de la « visite » ; « ton esclave veut garder les commandements ». C’est notre offrande, aujourd’hui.

   Quelle est l’attitude de la liturgie par rapport à l’enfer ? — Il nous faut distinguer dans l’histoire de la liturgie deux périodes.

a) L’ancienne liturgie parle peu de l’enfer. L’Église des martyrs est toute remplie de pensées de lumière, elle aspire au retour du Seigneur ; la virginité et le martyre sont son idéal de vie ; elle est environnée de persécuteurs. A cette, époque, la menace de l’enfer était à peu près inutile. C’est pourquoi, dans l’antique liturgie, il est rarement question de jugement et de damnation.

b) Il n’en fut plus de même à l’époque suivante. L’Église reçoit la liberté ; elle est protégée par les souverains séculiers. Des éléments tièdes et indignes pénètrent dans son sein ; la messe et les sacrements ne rencontrent plus le même respect. La haute moralité de l’époque des martyrs décline. L’Église est obligée de recourir à des moyens plus énergiques ; il lui faut inspirer aux chrétiens la crainte des châtiments. C’est de cette époque du Moyen Age que datent les textes liturgiques qui parlent du jugement, de la réprobation et de l’enfer. C’est sans doute alors que fut composé l’office de notre dimanche.            

   Quelle attitude devons-nous donc prendre, dans notre piété, par rapport à l’enfer ? Mettons-nous autant que possible dans les dispositions de l’Église ancienne. Travaillons plutôt d’une manière positive ; considérons le christianisme par son côté lumineux. Ne faisons pas du péché et de l’enfer le thème principal de notre méditation. Soyons un peuple saint qui aime le Père céleste et tend de toutes ses forces vers la maison paternelle. Cependant, à ce joyeux amour de Dieu, ajoutons une goutte de crainte respectueuse. La pensée de l’enfer doit de temps en temps se présenter à notre esprit et contribuer à nous faire chercher notre salut avec zèle. « Que celui qui est debout veille à ne pas tomber ». Amen

 

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27 juillet 2020 1 27 /07 /juillet /2020 06:54

   La liturgie traite trois grands thèmes pendant les dimanches après la Pentecôte. Le premier est la grâce baptismale ; nous sommes des baptisés et nous devons renouveler sans cesse la grâce du baptême ; chaque dimanche est un jour de baptême, une petite fête de Pâques. Le second thème occupe l’Église dans les derniers dimanches après la Pentecôte : c’est la préparation au retour du Seigneur. Le troisième thème se trouve précisément au stade actuel de l’évolution, c’est-à-dire au milieu du temps après la Pentecôte. Nous pouvons le désigner brièvement ainsi : le combat des deux mondes, Nous sommes établis dans le royaume de Dieu, mais nous sommes toujours combattus par le royaume du monde. Dans notre âme le triste héritage d’Adam continue son action dans notre nature corrompue. Nous hésitons, tant que nous sommes vivants, entre les deux royaumes.

   Ces trois thèmes caractérisent assez bien toute la vie chrétienne et nous montrent le chrétien réel. Au baptême, il a reçu un précieux trésor. L’Épître d’aujourd’hui nous l’indique en peu de mots : nous sommes les enfants de Dieu ; nous avons le droit d’appeler Dieu notre Père ; le Saint-Esprit a fait de nous ses temples et nous sommes les cohéritiers et les frères de Jésus-Christ. Cependant, le baptême ne nous pas fait entrer dans un pays de cocagne où nous pourrions vivre sans peine ni souci. Non ; l’Église nous envoi dans la vie rude, elle nous envoie au combat. Il nous faut défendre la terre sainte de notre âme contre l’ennemi, il nous faut apprendre à connaître l’ennemi pour le vaincre. Ce combat dure toute la vie. Notre Mère l’Église est, pour ainsi dire, notre maîtresse d’armes qui nous apprend les règles du combat ; elle est en même temps notre forteresse et notre bouclier dans le combat contre la nature inférieure. La messe du dimanche nous donne la force qui vient à notre secours dans les combats de la vie ; cette force nous délivre des embûches de l’ennemi, nous rend courage et persévérance dans le combat. Que produit, en effet, la messe ? Elle nous encourage au combat en nous faisant entendre la parole de Dieu dans l’avant-messe ; elle nous confère la force même de Dieu dans le sacrifice proprement dit. Nous ne sommes, par nous-mêmes, que de pauvres créatures et nous ne pourrions pas soutenir le combat. Mais, au Saint-Sacrifice, un autre combat pour nous, et le plus fort (le Christ) est vainqueur du fort. Tel est le sens du sacrifice de la messe : nous nous unissons au divin héros, au Christ ; sa victoire est notre victoire, son triomphe est notre triomphe. Telle est la force merveilleuse qui nous rend invincibles.

   Alors, nous sommes mûrs pour entrer dans la suite du divin héros, du divin Roi, Jésus-Christ. Pendant les derniers dimanches après la Pentecôte, l’Église nous fait contempler avec espérance et désir notre fin dernière. Tel est le pont d’or qui étend ses arches au-dessus de notre vie. Amen

 

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19 juillet 2020 7 19 /07 /juillet /2020 18:03

Le dimanche d’aujourd’hui nous montre deux images opposées : une image guerrière et une image pacifique.

    La première est une image guerrière. Le livre des Exercices de saint Ignace en donne une vive peinture. Nous voyons la plaine de Babylone. Sur un trône de feu et de fumée est assis le roi du monde, Lucifer. Il rassemble tous ses soldats. Il leur donne l’ordre de s’en aller dans tout pays et dans toute ville pour tenter les hommes. Ils doivent jeter leurs chaînes et tendre leurs filets pour soumettre beaucoup de sujets à leur roi. Lucifer indique aussi à ses soldats les moyens de captiver les hommes. C’est d’abord, par le désir des biens terrestres ; puis, par la recherche du vain honneur du monde : cela les conduit à l’orgueil indomptable. Nous voyons les soldats de Lucifer s’en aller pour exécuter avec zèle leur mission. Si nous nous demandons quelle est la solde des soldats de Lucifer, nous apprenons avec horreur que l’unique solde de ces soldats, c’est la mort, la mort éternelle. Nous voyons une autre réunion de guerriers. C’est dans la plaine de Jérusalem. Là aussi, un trône est érigé. Sur ce trône est assis le Roi Jésus-Christ : «  Tous les peuples applaudissent, car terrible est le grand Roi de l’univers entier » (Intr.). Il enrôle ici aussi des soldats pour son service. Il les envoie conquérir et agrandir le royaume de Dieu. Ils doivent aller dans toute ville, dans toute maison. Le Christ, lui aussi, indique les moyens de soumettre les hommes à son empire : ses soldats doivent les amener au mépris du monde, à l’acceptation de la souffrance et de la croix, et enfin à l’humilité. Si nous demandons quelle est la récompense des soldats du Christ, on nous répond : c’est la vie éternelle. Est-ce que l’Église nous laisse le choix entre ces deux récompenses ? Non, nous avons déjà choisi. Déjà, dans le baptême, nous avons renoncé au service de Lucifer. Quand le prêtre nous demanda : Renoncez-vous au démon, nous avons répondu : j’y renonce. Nous avons reconnu de tout cœur le Christ pour notre véritable Roi. Si l’Église a mis sous nos yeux cette image, c’était simplement pour que nous nous rappelions avec gratitude notre délivrance du joug de l’esclavage. Le dimanche est un jour de Pâques, un jour de baptême. Renouvelons nos promesses du baptême. Ne soyons pas des traîtres, des déserteurs, en adhérant tantôt à un parti, tantôt à l’autre. Rangeons-nous aujourd’hui de toute notre âme sous les étendards du divin chef de l’armée du ciel.

   La seconde image est une image pacifique. Nous entrons dans un beau jardin bien entretenu où se trouvent des arbres fruitiers innombrables. Dans ce jardin, le jardinier et ses aides travaillent inlassablement. A travers le jardin coule un ruisseau qui apporte la fraîcheur aux arbres. Le soleil brille avec une chaleur douce ; il fait mûrir les pommes rougissantes. Or, le maître de la maison vient trouver le jardinier. Tous les deux examinent un arbre qui a bien des feuilles, mais ne porte aucun fruit. Le maître secoue pensivement la tête et dit : « Il y a des années que je viens ici pour chercher des fruits sur cet arbre et je n’en trouve pas. Abats-le donc. Pourquoi occupe-t-il la terre ? » Le jardinier intercède auprès du maître : « Maître, laisse-le encore debout cette année. Je creuserai tout autour et je mettrai du fumier. Peut-être portera-t-il des fruits dans l’avenir. Sinon, tu pourras le faire abattre » (Luc, 13, 7 sq.). Le père de famille se laisse toucher. Tous les deux s’en vont. Ils voient les arbres chargés de beaux fruits et se réjouissent dans leur cœur. — Comprenons-nous cette seconde image ? Dans la première, il nous fallait choisir entre le Christ et le diable. Dans la seconde, nous entrons dans le jardin de l’Église. Chaque chrétien est un arbre de ce jardin. Le jardinier, c’est le Christ qui plante, nourrit, lie et appuie les arbres. Le ruisseau a jailli de la plaie du côté du Christ et coule dans les sacrements à travers le jardin de l’Église. Le soleil est le Saint-Esprit qui fait mûrir les fruits. Or, le père de famille circule avec le jardinier à travers les rangées d’arbres. Maintenant, Dieu le Père et le Christ visitent notre âme. Ils l’examinent en tenant compte non de la belle couronne de feuilles, mais des fruits, c’est-à-dire : des bonnes œuvres. Ils s’arrêtent devant un arbre. C’est moi. Hélas ! J’ai bien des feuilles, mais peu ou pas de fruits. Le Père de famille me regarde avec sévérité, mais le Christ prie pour moi. Il prie en ce moment à la messe ; il rappelle sa Croix.

Saint Paul nous présente dans une puissante antithèse deux images : l’esclave du péché et l’esclave de Dieu. Autrefois, avant notre conversion, nous étions soumis à la tyrannie du péché et nous mettions toutes nos forces à son service. Maintenant, nous servons Dieu et nous devons mettre notre âme, notre corps et notre vie à son service. C’est là la véritable liberté. Le fruit d’une telle vie, c’est la sainteté, et sa fin est la béatitude éternelle. « Mais maintenant que vous êtes délivrés du péché, vous avez comme fruit la sainteté, et comme fin la vie éternelle ». Ce sont là des paroles que le monde entier devrait méditer.

   Jésus parle, dans l’Evangile des tentateurs (faux-prophètes) et nous indique à quels signes nous les reconnaîtrons : leurs œuvres. Que veut nous dire l’Église ? Elle nous enseigne à distinguer la véritable vie chrétienne de la fausse. On reconnaît l’arbre à ses fruits ; de même on reconnaît le vrai chrétien non pas à ses paroles pieuses, mais à la manière dont il accomplit la volonté de Dieu. Gardons-nous donc de l’illusion ; sommes-nous un bon arbre avec de bons fruits ?

   Le fruit du Saint-Sacrifice est, aujourd’hui, la force et la grâce d’accomplir la volonté de Dieu, d’être un esclave de Dieu, un bon arbre. Amen

 

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