Nous venons de lire une longue page d’Evangile, la plus longue de toutes celles qui nous sont citées en cours d’année. D’une manière habituelle, les fidèles disent de ce passage du saint Evangile : c’est l’Evangile de la fin du monde. Cette dénomination est en partie exacte…mais en partie seulement. Car aussi bien les auteurs spirituels que les écrivains ecclésiastiques (dont les plus anciens portent le titre de ‘Pères de l’Eglise’)-aussi bien que les interprètes les plus qualifiés et les plus sérieux que nous nommons exégètes, tous s’accordent pour reconnaître dans ce texte deux parties bien distinctes.
Une partie touche la ruine de Jérusalem – l’autre partie effectivement la fin du monde. Il y a donc pour une claire compréhension de ce texte à distinguer ce qui revient à chacun de ces deux évènements. C’est la première difficulté.
Ainsi qu’on l’a marqué la ruine de Jérusalem est, non pas la fin du monde, mais la fin d’un monde, ce monde dominé par l’élection du peuple d’Israël qui devait recevoir le Sauveur et devenir par le fait même le flambeau du monde. Or Israël est déchu de sa prérogative en raison du rejet qu’il a opéré : St jean nous le dit en deux lignes au début de son Evangile : « Il est venu chez les siens et les siens ne l’ont pas reçu » Israël va donc disparaître et le signe tangible sera la ruine de Jérusalem et de son Temple. Jésus prévient et donne des signes : on pourra dons prévoir cette ruine « comme on escompte la venue de la belle saison d’après l’éveil printanier d’un figuier » - apprenez cette comparaison tirée du figuier…on pourra donc avant la catastrophe prendre la fuite et se mettre à l’abri. D’ailleurs la ruine n’est pas éloignée « Cette génération ne passera pas que tout cela n’arrive ! » Les évènements ayant eu lieu, il nous est d’autant plus facile d’en reconnaître l’annonce dans le discours de Jésus.
Quant à l’autre partie de la prophétie : elle concerne la fin du monde, de ce monde que nous habitons, coïncidant avec le dernier avènement du Fils de l’homme. Nous allons d’abord noter qu’aucune date même approximative ne nous en est donnée. Lorsque Jésus eut fini son discours, les disciples l’interrogèrent : Dites-nous quel sera le signe quand toutes ces choses seront près de s’accomplir ?-La réponse de Jésus : « Pour ce jour et cette heure personne ne les connait, pas même les Anges du ciel : il n’y a que le Père » (Comprenons que Jésus, Fils de Dieu, ne peut ignorer le jour où il paraîtra sur les nuées du ciel-cependant, comme révélateur des secrets de son Père, il n’a pas reçu mission de nous révéler ce temps). Et même Jésus va fournir une référence historique pour s’expliquer « comme aux jours de Noé, ainsi sera l’avènement du Fils de l’homme. Car, comme ils étaient aux jours d’avant le déluge, mangeant et buvant, se mariant et mariant leurs enfants, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche et qu’ils ne surent rien de la venue du déluge jusqu’à ce qu’il arriva et les emporta tous : ainsi sera l’avènement même du Fils de l’homme. »
Mais que faut-il penser des signes précurseurs que Notre Seigneur énumère dans son discours ? Il semblerait, vu l’insistance avec laquelle Jésus avertit ses fidèles que certains de ces signes n’apparaîtraient pas comme tellement décisifs que l’on puisse en tirer un indice certain de l’approche de la fin du monde. Ainsi quand Jésus dit : parce que l’iniquité aura abondé, la charité d’un grand nombre se refroidira -(cette déclaration précède le passage que nous avons lu) que peut-on dire sinon que notre temps actuel pourrait bien sembler en passer par là : la perte de la foi attisée par les faux prophètes qui sont légion en notre monde, d’autant plus dangereux et ‘performants’ qu’on en retient que ce qui flatte les foules, cette perte de la foi, et donc de la vérité, entraîne immanquablement celle de la charité, c’est-à-dire, en premier lieu, l’amour de Dieu qui est oublié, absent, en attendant d’être renié et repoussé.
Jésus prévoit aussi l’annonce de son Evangile « Cet Evangile du Royaume sera prêché dans le monde entier en témoignage à toutes les nations ; et alors viendra la fin ». Il est aisé de constater que la diffusion de l’Evangile a été pratiquement universelle. Mais que constate-t-on aussi : que de plus en plus la contestation se répand dans les rangs même du catholicisme, faisant fi de toute la tradition de l’Eglise, de son enseignement, de son autorité, de l’éducation qu’elle avait su donner pour pratiquer la piété et la morale.
Si Jésus n’en parle pas ici, l’apôtre Saint Paul, lui, annonce solennellement la conversion des Juifs : « Par leur chute, le salut est arrivé aux Gentils…si leur chute a été la richesse du monde que ne sera leur plénitude…leur réintégration sinon une résurrection ? » Apparemment ce point du programme ne se réalise pas ! pour le moment !
Enfin, il y a l’apparition de l’Antéchrist et l’apostasie qu’elle entraînera, qui dépassera celle que nous connaissons et que nous subissons actuellement. De ceci nous reparlerons sans doute…
Je n’ai encore rien dit des phénomènes qu’on appellerait maintenant cosmiques, auxquels Notre Seigneur semble donner une grande importance. Ces phénomènes toucheraient le soleil, la lune, les étoiles ; saint Luc y ajoute la mer et ses flots, toutes choses qui feraient « sécher les hommes de frayeur (nous lirons ces paroles dimanche prochain). Je n’en ai rien dit parce qu’il semble que ces phénomènes seraient les derniers avant l’apparition du ‘signe du Fils de l’homme’ et l’arrivée de Jésus lui-même.
Cette vision eschatologique est certainement difficile à interpréter ; ce terme ‘eschatologie ‘vient du grec « ta eschata » qu’on traduit en français « les dernières choses » et qui s’applique donc à la fin du monde. De nos jours, on ne peut nier que le chrétien moyen soit peu préoccupé de problèmes eschatologiques. Hélas !oui. Mais prenons y garde : d’autres s’en occupent et le nombre croissant de sectes qui préparent leurs adeptes à la fin du monde est en croissance continuelle. Il ne s’agit pas, de notre côté, de faire de la surenchère. Mais, si en fêtant le dernier dimanche d’octobre la Royauté de NSJC nous savions qu’elle ne sera pleine et entière que dans son Royaume, le Ciel ; nous devons en préparer en quelque sorte la proclamation solennelle qui aura lieu en ces jours-là où il reviendra avec puissance et majesté sur les nuées du ciel au-dessus de cette terre qu’il a arrosée de son Sang.
Ce que Dieu veuille que nous fassions avec un réel enthousiasme. Amen