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20 mai 2018 7 20 /05 /mai /2018 17:51

   La description de la venue de l’Esprit-Saint sur les apôtres le jour de Pentecôte est si enlevée qu’on se laisse captiver par le récit au risque de ne pas voir certaines choses. L’une d’entre elles se rencontre pourtant dès la première ligne : « Ils se trouvaient réunis tous ensemble. » Le détail n’est pas insignifiant. Dès sa première manifestation, l’évènement de la venue de l’Esprit se produit au sein de l’Eglise naissante, au cœur de la communion fraternelle. Cette communion représentée ici par le groupe des apôtres, mais qui compte aussi des femmes, dont Marie la mère de Jésus. Cent vingt personnes au total, que le récit nous montre assidues à la prière et à la fraction du pain.

   Parmi les raisons qui conduisent à parler de l’Esprit-Saint dans son lien spécial à la communion fraternelle, la plus évidente est bien celle-là. Comme les premiers disciples, nous ne faisons l’expérience de l’Esprit que dans l’Eglise. Que nous en soyons conscients ou pas ! Depuis le baptême où nous avons reçu l’Esprit-Saint pour la première fois, nous sommes insérés dans le grand corps ecclésial dont le Saint-Esprit est l’âme. Nous sommes dès lors partie prenante de la communion ecclésiale. L’Eglise est le lieu où nous continuons à recevoir l’Esprit.

   Cette vérité apparaît de façon évidente dans les Actes des Apôtres. Si l’on excepte saint Jean, il est en effet relativement peu question de l’Esprit dans les autres évangiles. En revanche, tout change dans les Actes et chez St Paul. On y retrouve l’Esprit à chaque page, car il accompagne pas à pas le développement de la nouvelle communauté. Jésus avait plusieurs fois fait allusion à la nécessité pour lui de retourner vers le Père afin qu’il puisse nous envoyer son Esprit. Or depuis le moment où, sur la Croix, il a rendu son dernier souffle, il a aussi « livré l’Esprit ». Dans la vie de la première communauté chrétienne, c’est cela que nous voyons : l’accomplissement de la promesse, prophétique aussi bien que christique : « J’ai répandu mon Esprit sur toute chair »…

   Il suffit de parcourir les Actes pour s’apercevoir que l’Esprit est présent au sein de la communauté des croyants avec une fréquence et une intensité particulières. Cela n’a rien d’étonnant, car il est l’Esprit de la communion. L’action de l’Esprit-Saint est directement ordonnée à l’unité du corps ecclésial : « C’est dans un seul Esprit que nous avons été baptisés pour ne former qu’un seul corps. » Ce corps, c’est le corps du Christ, c’est l’Eglise. Cet Esprit, c’est l’Esprit du Christ. De même que notre âme unifie tout l’organisme de notre corps, de même l’Esprit-Saint est l’âme du corps du Christ qu’il rassemble dans l’unité.

   Si l’on cherche à comprendre comment l’Esprit-Saint œuvre à l’unité dans l’Eglise, on s’aperçoit qu’il le fait d’une double façon. On ne pense pas assez à la première : l’Esprit-Saint réalise cette unité par la diversité des vocations et de dons qui structurent le corps ecclésial et lui donne sa forme. St Paul le dit très bien : « Les fonctions dans l’Eglise sont variées, mais c’est toujours le même Esprit ». Il dit cela pour souligner que, dans la communion, les vocations personnelles - qu’on appelle aussi des charismes - sont soumises à la régulation des ministres qui sont en charge de l’autorité - ils ont pour cela un charisme ministériel. La chose est aussi importante aujourd’hui qu’au temps de St Paul, car c’est précisément cette architecture hiérarchique qui permet à l’organisme de vivre et d’agir comme un tout bien équilibré. Sans quoi, au lieu de la communion, nous n’aurions que désordre. Des charismes individuels qui se dresseraient contre cette harmonie de l’ensemble ne viendraient certainement pas de l’Esprit. La foisonnante diversité des vocations dans l’Eglise ne porte en rien atteinte à l’unité, car l’Esprit ne peut pas agir contre lui-même. C’est l’unique Esprit qui opère tout cela. Diversement selon la place différente de chaque membre dans le corps, bien sûr ! Personne dans ce corps ne peut agir égoïstement pour son bien personnel, car « chacun reçoit le don de manifester l’Esprit en vue du bien de tous ».

   Quant à la seconde façon dont l’Esprit accomplit son œuvre d’unité, c’est évidemment par l’amour qu’il a répandu dans nos cœurs. Cela est capital. Si l’on rattache à l’Esprit la charité qui rassemble dans l’unité la communion fraternelle de l’Eglise, c’est que déjà dans la Trinité sainte il est le lien, le nœud d’amour entre le Père et le Fils. Son action parmi nous reprend et renforce le mouvement de l’amour qui réunit déjà les êtres qui s’aiment. Mais il ne laisse pas cet élan spontané à son niveau purement naturel. Son opération surélève cette communion première des cœurs et des esprits à un niveau proprement surnaturel, car il prolonge parmi nous son action au sein de la Trinité. Dieu nous aime et nous fait nous aimer les uns les autres de l’amour incréé dont il s’aime lui-même.

   Cela paraît inouï - et çà l’est effectivement ! -, mais grâce à l’Esprit-Saint, la communion ecclésiale est un reflet sur terre de la communion trinitaire. Pâle réplique certes ! Réplique aux dimensions désespérément humaines et terrestres, fragile et menacée par toutes nos faiblesses et nos péchés, minée par notre manque d’amour…Mais c’est pourtant ce qu’elle est en profondeur : la grâce du mystère ineffable qui nous dépasse de toutes parts et que nous avons pourtant à vivre. Car, comme toujours, le don s’accompagne d’une tâche. La réussite du dessein divin dépend en partie de nous ; il nous incombe de vivre plus profondément chaque jour de cet Esprit qui nous a été donné : « Puisque l’Esprit est notre vie, que l’Esprit nous fasse aussi agir ! » Amen.

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14 mai 2018 1 14 /05 /mai /2018 06:43

   Après l’encensement, se fait le lavement des mains du prêtre appelé souvent le lavabo du premier mot du Psaume 25 qui est récité à ce moment-là. Le mot lavabo est la première personne du singulier du futur du verbe lavare qui veut dire laver, tout simplement : le français vient ici pratiquement et directement du latin. La formule lavabo a eu une fortune étonnante dans le vocabulaire puisqu’on l’a employée telle quelle pour désigner l’endroit où l’on se lave et le meuble qui sert à se nettoyer.

   Sans doute du temps où le prêtre recevait les dons en nature que les fidèles apportaient à l’offertoire ce lavement des mains pouvait être nécessaire ; après le maniement de l’encens et de l’encensoir il peut encore se comprendre. Mais de fait, c’est toujours le sens mystique de ce rite qui a prévalu dans l’explication qu’on en donnait.

   Il faut remarquer que le prêtre ne place pas sa main toute entière sous l’écoulement de l’eau, mais seulement l’extrémité de ses doigts, tout particulièrement le pouce et l’index de chaque main, lesquels doigts vont seuls toucher le Corps du Christ quand l’hostie sera transsubstantiée (i.e. que du pain elle sera devenue ce Corps de NS). Cette circonstance est donc interprétée comme le symbole du soin que doit prendre le prêtre de se purifier le cœur des fautes les plus légères.

   Le texte du Ps 25 qui accompagne ce rite va d’ailleurs aider le prêtre à réaliser qu’il lui faut célébrer le sacrifice immaculé de l’Agneau de Dieu avec la plus grande pureté possible. « Je laverai mes mains avec les justes » : Comment le prêtre ose-t-il faire cette déclaration ? Ne vit-il pas au milieu du monde ? avec la faiblesse, la négligence, l’attachement aux choses terrestres, n’est-il pas facile que des fautes plus ou moins graves ternissent la pureté de son âme ? Il est vrai, et le prêtre le sent plus que personne ; mais chaque jour, il doit s’efforcer (avec plus ou moins de réussite !) d’éteindre en lui l’amour du monde et de lui-même ; chaque jour, il doit s’efforcer de laver de plus en plus son âme dans le Sang de JC. Et dans les larmes de la pénitence.

   Dans cet esprit s’exprime le mystique Denis le Chartreux : « Que le dévot et digne prêtre du Christ dise : ‘je laverai’ quand il est sur le point d’accéder à la célébration - entre les justes - c’est-à-dire avec les saints et vrais prêtres de la Loi Nouvelle, à aucun desquels il ne doit nuire mais au contraire avoir le souci de soutenir leur réputation par toutes ses paroles et ses exemples - mes mains - non seulement corporelles avec lesquelles je vais servir les mystères du Christ, mais même mes sentiments, mes pensées et mes actions : je les laverai dans la confession parce qu’au témoignage de l’Ecriture, tout cela est lavé dans la confession ».

   Un autre auteur précise encore : « Que si le calice et la patène ne doivent pas seulement être de métal précieux d’or ou d’argent, mais de plus, pur de toute poussière ou de toute tache parce qu’ils touchent le très saint Corps et le Sang du Sauveur, combien à plus forte raison il conviendra que le prêtre ait les mains pures de toute œuvre dépravée, qu’il tienne sa langue loin des paroles déplacées, et son cœur des mauvais désirs et des mauvaises pensées et qu’il se purifie de toute impureté même très petite ».

   Vous remarquerez de nouveau ici, combien vous devez soutenir par votre prière et votre vigilante attention vos prêtres qui, entourés de faiblesse, attendent aussi cette intervention de votre sollicitude. Sans doute serait-il bon de dire avec le prêtre les paroles du psaume dans cette intention de l’aider à se sanctifier, tout en vous appliquant à les approprier en même temps aux dispositions que Dieu exige aussi de votre part pour le sacrifice présent. Vous l’offrez avec votre prêtre : la pureté d’une bonne vie, la résolution de marcher dans la voie droite vous sont indispensables.

   On remarquera, de plus, cet autre passage du psaume : « Seigneur, j’ai aimé la beauté de votre maison et le lieu où réside votre gloire » Il s’agit là de deux choses complémentaires : la maison de Dieu doit être l’objet de tous les soins du prêtre : sa beauté exige ordre et propreté. Rien ne doit être retranché de ce qui peut enrichir l’église. Rappelez-vous le Saint Curé d’Ars qui, vivant dans une extrême pauvreté, choisissait les plus précieux tissus pour les ornements de l’autel et du matériel de prix pour le culte et l’ornementation.

   Que les fidèles subviennent aussi par leurs dons et par leur travail à la beauté de leur église est le signe manifeste de leur foi authentique.

Quand cette beauté extérieure est obtenue, il reste qu’il faut encore que prêtre et fidèle se souviennent que c’est là que le Seigneur manifeste sa gloire : dans le secret du tabernacle où nous recherchons l’intimité avec Jésus - où nous devons consumer nos heures les plus douces parce que c’est là que jaillit la source des joies les plus pures et qu’on reçoit les bienfaits les plus signalés.

   Ainsi affermis chaque dimanche (et peut-être plus souvent à l’occasion) notre pied peut demeurer ferme dans la voie droite… (car il est si facile d’aller de travers quand on est réduit à ses propres forces !)

et (de semaine en semaine) je vous bénirai Seigneur dans nos assemblées : spécialement cette assemblée dominicale au cours de laquelle nous entendons (comme le dit Denis le Chartreux déjà cité tout à l’heure) à partir de ce psaume profond et plein d’éclat ce qui touche au perfectionnement chrétien.

   Ne manquez donc pas de remarquer ce chemin tracé, et de le suivre dans la fidélité. Amen

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10 mai 2018 4 10 /05 /mai /2018 20:49

   Nous avons tous présentes à la mémoire ces représentations de l’ascension du Seigneur - icônes ou peintures - ou l’on voit encore les deux pieds du Christ disparaissant sur un nuage…Les disciples bouche bée, les yeux écarquillés, regardent s’en aller - pour toujours, pensent-ils - ce Jésus en qui ils avaient placé tant d’espoirs… Il s’en va sans avoir rétabli la royauté en Israël comme ils l’avaient espéré. Il les laisse au contraire dans la complète ignorance des temps et des moments de l’histoire à venir…

   Passons sur le côté naïf de ces images !... Deux promesses sont faites ce jour-là aux disciples. Celle du Christ qui leur annonce le baptême dans l’Esprit-Saint, c’est-à-dire sa propre présence continuée sous une autre forme. Celle des anges, qui les assure que ce Jésus qui leur a été enlevé reviendra à la fin des temps pour les prendre avec lui dans la gloire. Ces deux promesses cristallisent tout le paradoxe de la vie chrétienne, à la fois douloureux et joyeux.

   Joyeux, car nous avons la certitude que le Seigneur est avec nous, que son Esprit œuvre à nos côtés et même par nous. Et qu’ainsi nous pouvons travailler avec lui à la mission que Jésus confie aux siens. Faire de toutes les nations des disciples. Leur annoncer la Bonne Nouvelle. Faire connaître à tous les orphelins de la terre qu’ils ont un Père dans les cieux, capable de combler toutes les absences et toutes les frustrations. Les initier à la surabondance de vie et d’amour de la communion trinitaire. Leur apprendre en conséquence à s’aimer et à se vouloir du bien comme les fils d’un même Père, les frères d’un même Fils aîné… Cet idéal a beau se dérober sans cesse à nous comme un horizon qui recule au fur et à mesure qu’on avance vers lui, c’est bien cela le sens de la promesse.

   Et pourtant - c’est le côté douloureux - nous ne pouvons nous empêcher, comme les apôtres, de regarder vers le ciel où a disparu Celui que nous aimons. Comme disent les saints, notre cœur sera sans repos, sans joie vraie, jusqu’à ce que nous l’ayons enfin retrouvé… On n’aime guère s’attarder sur ce second aspect. Comme à propos de la Transfiguration, il peut sembler à certains que ce serait pécher que de vouloir s’attarder avec le Seigneur, de dresser près de lui sa tente, alors qu’il y a tant à faire dans le monde… Et on souligne alors que la disparition du Seigneur s’accompagne de l’envoi en mission et que nous ne pourrons pas nous reposer près de lui avant qu’il n’ait été annoncé partout…

   Certes !... Mais il se pourrait aussi que les motivations de ce refus ne soient pas toujours des plus pures !... Sans doute, je peux regarder vers le ciel avec une nostalgie de mauvais aloi et je peux trouver là un alibi pour me dérober à des tâches urgentes… Mais je peux aussi avoir tout simplement peur de me retrouver seul avec lui, dans une prière exigeante et difficile… Dans une méditation prolongée qui me ferait découvrir un abîme dans lequel je redoute de me perdre… Et je me perds alors bel et bien dans un activisme sans repos, qui n’a d’apostolique que l’écorce, car je délivre une parole vide, sans poids, insuffisamment mûrie dans la contemplation et la rumination de la Parole de Dieu.

   Il est tout de même paradoxal de constater la fuite vers des religions extrême-orientales - ou vers des gourous de substitution - de tant de jeunes qui vont chercher là le silence et la prière qu’ils n’ont pas trouvés auprès de leurs prêtres dans nos églises… Il n’est pas moins étonnant de voir même des incroyants se précipiter de plus en plus vers des monastères de contemplatifs et de contemplatives dans l’espoir d’y trouver la dimension spirituelle que notre monde matérialiste leur refuse… Notre monde est besogneux de salut et ce salut est au-delà des mots et de l’agitation… Il faut donc s’employer de tout notre pouvoir à ménager des plages d’accueil qui permettront à cette quête d’y faire halte…à creuser des puits assez profonds pour que cette soif d’intériorité puisse s’y épancher…à restaurer cette dimension de l’existence chrétienne afin que notre foi redevienne une vie qui ne soit plus mutilée de sa « meilleure part »… L’épisode de Marthe et Marie est pourtant bien fait pour nous faire réfléchir !

 

   Il reste vrai aussi que le message des anges le jour de l’Ascension est de nous faire comprendre le lien qui existe entre l’annonce de l’Evangile et la fin des temps. Par l’annonce de l’Evangile, par la célébration du culte sauveur et surtout de l’eucharistie, par notre prière, par toutes nos œuvres bonnes, nous travaillons à hâter le retour du Seigneur dans sa gloire. Loin de vouloir repousser le plus tard possible la fin des temps qui verra ce retour, toute notre vie, tout ce que nous faisons, tout ce que nous sommes, devrait au contraire exprimer que nous sommes dans l’attente de ce retour. Non pas dans une nostalgie éplorée et inefficace, mais bien dans le désir ardent de revoir sa Face - ou pour mieux dire quand il s’agit de nous, de la découvrir enfin. Il s’agit de partager ce même désir dont il était lui-même animé en célébrant la dernière Pâque avec ses disciples. Ce désir dont nos frères les premiers chrétiens avaient fait leur prière : Marana tha. Viens, Seigneur Jésus !...

   Les apôtres qui regardent vers le ciel quand disparaît le Seigneur nous rappellent (avec St Paul), que « notre vie est cachée en Dieu avec le Christ », que notre vie définitive trouvera là son accomplissement et sa consommation.  Nous n’y arriverons certes pas en restant les bras croisés et nous avons à travailler dans l’amour pour que son règne vienne. Mais n’oublions pas que c’est pour cela que nous œuvrons: afin que Dieu soit tout en tous. Amen

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6 mai 2018 7 06 /05 /mai /2018 17:46

   L’encensement de l’Offertoire a d’abord été destiné aux oblats. Il va se poursuivre par l’encensement de la Croix qui est le plus respectable de tous les objets en vue sur l’autel. La croix a droit à l’adoration, non en tant qu’objet, mais en raison de ce qu’elle représente le premier autel du Sacrifice de Jésus, liée intimement à sa personne : on l’encense au maximum c’est-à-dire 3 fois 2 coups. S’il y avait sur l’autel des reliques de saints, elles seraient encensées tout de suite après.

   L’encensement de la Croix est accompagné de ces paroles du Psaume 140 « Que ma prière s’élève vers Vous, Seigneur, comme l’encens en votre présence ; que l’élévation de mes mains soit comme le sacrifice du soir ». Ce psaume a été composé par le roi David alors qu’il était fugitif et loin du sanctuaire (du moins c’est ce que pense certains interprètes). Ce sacrifice du soir, c’est celui qui terminait la journée en présence de l’Arche du Seigneur à Jérusalem.

   Alors le prêtre va entreprendre l’encensement général de l’autel : rien n’est omis : la table de l’autel et le devant (on peut même tourner tout autour quand cela est possible). Durant ce temps, il continue les paroles du psaume : « Mettez Seigneur une garde à ma bouche, et une porte bien défendue à mes lèvres, afin que mon cœur ne se laisse pas aller à des paroles de malice pour chercher des excuses à mes péchés. » Autrement dit la prière n’est exaucée que si elle s’échappe d’un cœur innocent et de lèvres pures ! ce qui exige une vigilance continuelle.

   L’encensement se termine par celui des personnes, le célébrant d’abord, ses ministres s’il en a et les membres du clergé, ceux qui sont présents dans le chœur, et les fidèles. Tandis qu’il remet l’encensoir au clerc qui en est chargé, le célébrant emploie cette formule : « Que le Seigneur allume en nous le feu de son amour et la flamme de l’éternelle charité ».

   Disons en résumé que l’encensement de l’autel a pour but de figurer l’accueil favorable fait par Dieu au sacrifice ; l’encensement du célébrant, du clergé et du peuple fidèle est l’expression symbolique du désir de voir la miséricorde divine descendre sur tous ceux qui participent à la Messe. Cette cérémonie doit aussi rappeler aux assistants leur noblesse comme membres de Jésus-Christ et temples du Saint-Esprit et les avertir de répandre par leur conduite la bonne odeur de la piété et de la vertu.

   Le symbolisme de l’encens a été largement commenté par les écrivains ecclésiastiques. Voici, à titre documentaire et pour l’élévation de vos pensées quelques aperçus de cette richesse d’interprétation :

1) L’encens est brûlé à l’autel pour marquer dans ce lieu saint que les créatures doivent être employées et consumées pour le service de Dieu et pour sa gloire. Saint Ambroise était persuadé qu’un Ange présidait à nos encensements comme autrefois à ceux du Temple, ce qui lui fait dire à l’occasion de l’apparition de l’ange au Saint Patriarche Zacharie, père de St Jean-Baptiste « Plaise à Dieu qu’un ange soit présent ou plutôt qu’il se rende visible lorsque nous encensons les autels et que nous offrons le sacrifice ! »

2) l’encens qu’on brûle autour de l’autel d’où le parfum se répand dans l’église est regardé comme une marque de la bonne odeur de Jésus-Christ qui se répand de l’autel dans l’âme des fidèles. Saint Germain de Constantinople dit : « l’encensoir marque l’humanité de Jésus-Christ, le feu sa divinité, et la vapeur du parfum sa grâce. »

3) L’encens est la vive expression des prières que nous adressons à Dieu et du désir que nous avons qu’elles s’élèvent vers lui comme ce doux parfum.

   J’ai trouvé cette citation mais sans pouvoir vous dire à qui l’attribuer : elle reprend à notre niveau ce que St Germain disait précédemment de NS.

« l’encensoir, l’encens et le feu sont des symboles mystiques, par l’encensoir est désignée l’âme pieuse, par l’encens les prières, par le feu l’amour d’en haut ». En effet l’encens ne s’élève que par l’activité du feu, ainsi nos prières ne peuvent aller jusqu’à Dieu qu’animées par le feu de l’amour divin.

   Pour terminer, je vous signalerai que l’encensement fait partie de ce qu’on appelle les sacramentaux, c’est-à-dire qu’il devient le distributeur de la bénédiction et de l’assistance de Dieu. Quand un autel est consacré, on brûle dessus de l’encens aux 5 croix et l’évêque prie Dieu tout puissant de daigner regarder, bénir et sanctifier cet encens afin qu’à l’odeur de son parfum toutes les langueurs, toutes les embûches de l’ennemi s’enfuient et s’éloignent de ses créatures rachetées par le Sang de son Fils et de ne pas permettre qu’elles souffrent jamais de la morsure du serpent infernal.

   Ainsi, sachez vous souvenir que la fumée de l’encens place tout ce qui est encensé dans une atmosphère sanctifiée.

Et soyez-en joyeux et réconfortés !...Amen 

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30 avril 2018 1 30 /04 /avril /2018 06:57

   Je commencerai l’exposé concernant l’encensement par une leçon de choses et de vocabulaire.

   Le mot encens vient du latin incensum, mot formé à l’époque du latin chrétien : il signifie « ce qui est brûlé » ; il a donné les mots encensement, encensoir, c’est-à-dire l’instrument qui sert à brûler l’encens.
   Le latin classique avait pris le mot, pour désigner ce que nous appelons encens, à la langue grecque. Cela a donné en latin le mot « thus ». Mais il faut savoir que dans d’innombrables cas un nom latin ne garde pas la forme qu’il a quand il est sujet : cette forme s’appelle ‘nominatif’. Il faut ensuite regarder la forme qu’il prend quand il devient complément de nom : cette forme s’appelle ‘génitif’, parce qu’elle engendre la forme des autres fonctions du nom. Ainsi, je cherche dans le dictionnaire latin le mot thus et je vois à côté le mot thuris, sa forme en quelque sorte développée. C’est à partir de cette forme thuris que je trouverai le nom de l’instrument qui sert à brûler l’encens le « thuribulum » et le nom du clerc qui est chargé de s’occuper de cet instrument le « thuriferarius », le thuriféraire.

Encore une précision de vocabulaire : le petit récipient qui sert à renfermer l’encens s’appelle ‘navette’, du latin navis, qui a donné navire. En effet ce petit récipient a généralement la forme d’une petite barque, tout comme la navette des tisserands ou des dentellières. Voilà en ce qui concerne le vocabulaire.

   L’encens lui-même est une résine d’arbre, plus exactement un latex qui provient de l’écorce, et non la sève comme la résine de nos pins. Les meilleurs arbres à encens poussent en Afrique (Soudan, Somalie, Erythrée) ou dans les Indes occidentales…

   Cette résine, comme toute résine, durcit au contact de l’air, et pour son emploi pratique on la concasse en petits grains ou on la met en poudre. Au contact du feu cette résine s’échappe en fumée laquelle est odoriférante. Constatons que l’odeur de l’encens n’atteint sa pleine qualité que lorsque la fumée s’est répandue largement dans l’église. On s’aperçoit surtout du parfum de l’encens quand on entre dans une église après un office au cours duquel on en a fait l’emploi. Voilà ce qui concerne la leçon de choses.

   Je passe maintenant au rite de l’encensement tel qu’il se déroule pendant l’offertoire. A remarquer cependant, au passage, que dans les messes solennelles, il y a eu déjà un premier encensement pendant la poursuite du chant de l’Introït et le début du Kyrie. Le but de cet encensement est d’honorer tout de suite l’autel qui sera le lieu central du Saint Sacrifice de la Messe. L’encensement de l’offertoire est plus détaillé et du fait même plus solennel. L’encensoir contenant des charbons enflammés et la navette d’encens sont présentés au célébrant lequel dépose à trois reprises les grains d’encens sur le feu. Il prononce en même temps cette formule : « Par l’intercession du bienheureux Michel archange qui se tient debout à la droite de l’autel de l’encens et de tous ses élus, que le Seigneur daigne bénir cet encens et le recevoir en odeur de suavité. Par le Christ NS Amen. » et le prêtre trace le signe de la Croix sur l’encensoir.

   Cette formule fait donc intervenir directement l’archange St Michel. On sait qu’il est le Chef de la Milice céleste (princeps militiae caelestis) et le protecteur céleste de l’Eglise militante. Dans une de ses visions rapportées par le livre de l’Apocalypse, l’apôtre St Jean précise qu’il voit dans le ciel un ange qui se place près de l’autel de l’Agneau (le Christ) avec un encensoir d’or et il ajoute « on lui donna beaucoup de parfums pour qu’il les offrit avec les prières de tous les saints sur l’autel d’or qui est devant le trône de Dieu » Cette remarque a son importance pour comprendre le symbolisme de l’encens que nous expliquerons par la suite. D’ailleurs dans l’une de ses plus célèbres apparitions, au Mont Gargan, en Italie du Sud, apparition qui précéda celle du Mont Saint Michel en France, l’archange se montra tenant à la main un encensoir au lieu même où une église devait être construite en son honneur.

   L’encens étant imposé, le prêtre prend l’encensoir et encense d’abord les offrandes du pain et du vin. A trois reprises il forme le signe de la croix au-dessus de ces offrandes, puis il décrit trois cercles autour de ces mêmes offrandes, les deux premiers dans le sens contraire de ce qu’on appelle maintenant le sens des aiguilles d’une montre et le 3ème en sens inverse. Les deux premiers cercles sont en l’honneur du Père et du Fils, le 3ème en l’honneur du Saint-Esprit qui procède du Père et du Fils. Pendant qu’il accomplit ces gestes le célébrant prononce ces paroles « Que cet encens béni par vous monte jusqu’à vous, Seigneur et que votre miséricorde descende sur nous ».

Ces signes de croix et ces cercles tracés par la fumée de l’encens forment une sorte d’atmosphère mystérieuse et sacrée qui sanctifient les éléments du sacrifice ; ces grains d’encens qui se consument sur le feu et montent vers le ciel comme une vapeur embaumée et agréable, expriment la demande que le pain et le vin ne tardent pas à être consumés par le feu de l’Esprit-Saint pour faire place au Corps et au Sang du Sauveur. C’est vraiment la prolongation de l’invocation « Venez Sanctificateur » dont nous avons parlé précédemment.

   Mais l’encensement n’est pas terminé, nous parlerons de la suite, dimanche prochain, ainsi que du symbolisme de l’encens. Amen

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 07:07

   Le prêtre a présenté successivement à Dieu le Père le pain, le vin, les fidèles qui sont là unis à lui. Offrande dont on a dit qu’elle était une oblation, c’est-à-dire que ce qui est placé devant Dieu a reçu une destination précise et qui ne peut pas normalement être détournée.

   C’est alors qu’intervient un rite qui pourrait facilement passé inaperçu, tellement il est bref. Mais nous allons considérer son importance.

   Le prêtre qui s’était incliné, l’extrémité de ses doigts posés sur l’autel, pour faire cette belle prière d’offrande des fidèles, reprise de l’Ancien Testament au livre de Daniel, comme nous l’avons dit, dimanche dernier, le prêtre donc se redresse, il élève les mains à la hauteur de ses épaules en écartant les bras et regardant vers le ciel. Il dit alors cette simple formule : « Venez, Sanctificateur tout-puissant, Dieu éternel, et bénissez ce sacrifice préparé pour votre Saint Nom » et en prononçant ce dernier membre de phrase il abaisse les bras et de la main droite étendue trace le signe de la Croix sur le calice et l’hostie ensemble.

   Cette formule porte un nom quelque peu savant qui vient du grec : c’est l’épiclèse qui veut dire tout simplement « invocation »

Dans toutes les liturgies l’épiclèse désigne une prière liturgique qui implore du Saint-Esprit la transsubstantiation des éléments eucharistiques et la communication des fruits du sacrifice.

   On remarquera tout d’abord que le Saint-Esprit n’est pas désigné sous ce nom, mais par le mot Sanctificateur. Mais par ce mot on se doit de le reconnaître immédiatement. C’est en effet son titre particulier : le Père est le Créateur, le Fils est le Rédempteur, le Saint-Esprit est le Sanctificateur. C’est ce qu’on appelle en langage théologique l’appropriation, c’est-à-dire une attribution particulière, plus personnelle faite à chacune des Personnes de la Sainte Trinité.

   Avant que cette prière ne soit définitivement adoptée dans le rite romain, on trouve des formules plus détaillées dans ce qu’on appelle des sacramentaires : et là, en général, on donnait au Saint-Esprit son nom propre ce qui permet de ne laisser aucun doute sur le destinataire de cette invocation.

   Nous allons nous y attarder en remarquant que l’appel adressé au Saint-Esprit est en vue de la bénédiction du Sacrifice.

Pour comprendre cette demande, il faut répondre à trois questions :

-que signifie le mot bénir ?

-quelle bénédiction appelons-nous ici ?

-pourquoi attendons-nous cette bénédiction du Saint-Esprit ?

1/que signifie le mot bénir ? Il vient du latin ‘benedicere’ qui signifie dire du bien ou encore bien dire. Dans le premier sens « dire du bien » bénir a la même signification que louer, glorifier. Quand au Chemin de Croix, par exemple, je dis : Nous vous adorons ô Christ et nous vous bénissons, il n’est bien entendu pas question que nous donnions au Christ notre bénédiction, mais que nous le louons de nous avoir racheté par sa Croix.

Dans le deuxième sens, bénir = bien dire, signifie alors parler bien pour quelqu’un, lui souhaiter du bien. Dans ce sens, chacun de nous peut bénir, souhaiter du bien et en procurer par les prières et les vœux que l’on formule. Mais ces bénédictions ne sont pas forcément couronnées de succès. La bénédiction liturgique, elle, pratiquée par l’autorité de l’Eglise sur l’ordre et avec l’autorité de Jésus communique la grâce et la sanctification. Cette forme de bénédiction est ordinairement réservée aux ministres sacrés.

2/quelle bénédiction appelons-nous ici ou, si vous voulez, de quelle bénédiction s’agit-il ?

Il s’agit de la bénédiction la plus haute qui soit : c’est la consécration : les dons offerts ne peuvent recevoir une bénédiction supérieure à celle qui va les faire devenir le Corps et le Sang de NSJC. En bénissant ces dons le prêtre demande la présence de l’Agneau de Dieu et la plénitude des bénédictions qui coulent de ses plaies.

3/pourquoi attendons-nous cette bénédiction du Saint-Esprit ? comprenez bien : pourquoi charge-t-on le Saint-Esprit de cette bénédiction ?

Il nous faut ici comprendre l’analogie, la ressemblance qu’il y a entre la Messe et l’Incarnation du Fils de Dieu. En quelque sorte, Jésus renaît à chaque messe sur nos autels. Comme nous reconnaissons dans le symbole que le Fils de Dieu a pris un corps dans le sein de la BVM par l’opération du Saint-Esprit, par son intervention, nous attendons de cette divine intervention le changement des éléments inertes du pain et du vin au Corps et au Sang de Jésus. « Comment cela se fera-t-il », demandait la Vierge à l’ange Gabriel qui lui répondait « Le Saint-Esprit viendra sur vous » - Ainsi dit St Jean Damascène « vous demandez comment le pain devient le Corps de JC, comment le vin et l’eau deviennent son Sang ? Je vous réponds : le Saint-Esprit descend et opère une merveille au-dessus de toute expression comme de toute intelligence ».

   Dans l’antiquité chrétienne, on conservait le Saint Sacrement non dans un coffret (tel qu’est notre tabernacle) mais dans une colombe d’or ou d’argent suspendue au baldaquin (ciborium) qui couvrait l’autel. Ce récipient signifiait, par sa représentation, que le Corps précieux du Sauveur qui y était contenu était une formation du Saint-Esprit.

   Il va de soi que nous ne devons pas rester étrangers à cette bénédiction du Saint-Esprit. St Paul précise (ép aux Hébreux) « que le Christ s’est offert lui-même comme victime sans tache par le Saint-Esprit » ; il faut de même que le Saint-Esprit nous inspire un amour qui en quelque sorte nous transforme, nous aussi, pour devenir semblables à la Victime que nous offrons et à laquelle nous sommes incorporés depuis notre baptême.

   Quel dépassement nous permet le Saint Sacrifice de la Messe. Pensons-y souvent ! Amen

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16 avril 2018 1 16 /04 /avril /2018 11:03

   Le pain et le vin sont maintenant sur l’autel. Ils ont été les sujets d’une oblation aussi les appelle-t-on désormais les oblats. J’ai déjà employé ce mot oblation en vous précisant que je vous en donnerais le sens. De par son origine latine, ce mot signifie que l’on porte, que l’on place quelque chose devant quelqu’un. Le mot français offrir qui vient du même verbe latin a cependant perdu de sa force originelle. Le mot oblation comporte de plus que ce qui est porté devant quelqu’un a reçu une destination précise, formelle. Ainsi en est-il du pain et du vin qui sont là avec l’unique but d’en faire le Corps et le Sang de Jésus et de réaliser son Sacrifice eucharistique. Nous retrouvons là toute la force, dont je vous ai entretenu, de l’Offertoire qui est une véritable anticipation du Sacrifice de l’Autel qui ne sera cependant réalisé qu’à la Consécration. De nouveau, je vous rappelle que Luther qui avait en abomination la Messe comme sacrifice, rejetait cet offertoire qui ne faisait qu’en accentuer davantage l’allure.

   Voilà donc ce Pain destiné à devenir le Corps du Christ, voilà donc ce vin destiné à devenir son Sang : ils ont été présentés à Dieu, retiré de tout autre usage profane : à travers eux, le Christ est déjà offert, il reste à offrir les fidèles, car Jésus-Chef (tête) ne se comprend plus sans ses membres. Et voici que le prêtre agissant au nom de toute l’assemblée des fidèles va s’incliner profondément pour dire ces paroles : « Dans un esprit d’humilité et avec un cœur contrit que nous soyons reçus par Vous, Seigneur, et que notre sacrifice s’accomplisse de telle sorte, en votre présence aujourd’hui, qu’il vous soit agréable, Seigneur notre Dieu. »

   Il sera bon de vous rappeler par qui et quand ont été dites ces paroles pour la première fois.

Elles sont empruntées à une prière faite par les trois jeunes hommes dont nous parle le prophète Daniel. Ils avaient pour nom Ananias, Misaël et Azarias : compagnons de captivité de Daniel à Babylone au temps de la déportation du royaume de Juda, le chef des eunuques du roi Nabuchodonosor changea leur nom en ceux de Sidrac, Misac et Abdenago tandis que Daniel prenait celui de Baltassar. Les trois premiers furent condamnés à être brûlés dans une fournaise à la suite d’une dénonciation portant sur le fait qu’ils avaient refusé d’adorer une statue gigantesque que le roi avait dressée, le représentant lui-même. Dieu envoya un ange qui protégea du feu ces trois garçons qui priaient au milieu des flammes, Azarias disant entre autres ces paroles qui constituent l’oraison que je vous citais plus haut.

   Cet esprit d’humilité (humilié), ce cœur contrit avec lequel les trois jeunes hommes prièrent Dieu d’agréer le sacrifice de leur vie convient, ô combien, en cet instant. Saint Grégoire le Grand le fait remarquer avec bonheur : « Dans cette sainte action nous devons nous sacrifier nous-mêmes dans la contrition du cœur ; et, en célébrant le mystère de la Passion du Seigneur, imiter ce que nous fêtons. Alors la Sainte Messe sera pour nous un sacrifice auprès de Dieu si nous-mêmes devenons une victime. »

Mais je vous cite encore la suite des paroles de St Grégoire qui nous font entendre que la Messe à laquelle nous prenons part a sa prolongation dans notre vie habituelle : « Efforçons-nous aussi de garder notre esprit dans le recueillement, même après le temps de la prière, autant que nous le pouvons avec la grâce divine, afin que des pensées volages ne le dissipent point, que des joies insensées ne se glissent pas dans notre cœur, et que notre âme ne perde pas la contrition que nous avons gagnée. »

   Il sera donc bon de nous rappeler que nous devons assister à la Messe avec les sentiments que nous aurions eus au Calvaire. Or nous dit Saint Luc « Toutes les foules rassemblées à ce spectacle, après avoir regardé ce qui s’était passé, s’en retournaient en se frappant la poitrine »

   Evidemment, avec cela, on est bien loin de ces messes où l’on danse, où l’on frappe dans ses mains en cadence, où l’on débride les guitares ou autres instruments tapageurs. Ah ! bien oui…c’est une toute autre affaire.

   Et je vous livrerai une conclusion : « Par cette offrande l’Eglise sanctifie et consacre le sort de tous ses enfants ; par là elle accroît leur bonheur, elle adoucit leurs infortunes, elle bénit leur vie et leur mort, afin que partout ils vivent pour le Seigneur et meurent pour lui.

   Bien sûr, cette conclusion est quelque peu différente de celle qu’on a pu entendre après une messe dite moderne « Ah ! au moins on s’est éclaté » ! Mais est-ce encore la messe dans un cas pareil ???

Je ne pense pas que les chrétiens de Rome « s’éclataient » en célébrant ce qu’ils appelaient les Saints Mystères. Les catacombes romaines retracent souvent l’image des trois jeunes hommes dans la fournaise de Babylone. Les chrétiens si persécutés de ces siècles-là y trouvaient une source de courage et de consolation.

   Sachons nous-mêmes trouver en nos messes les mêmes biens pour féconder notre vie qui a tant besoin de remèdes et de reconstituants. Amen

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9 avril 2018 1 09 /04 /avril /2018 07:30

   Après avoir offert le pain et l’avoir déposé sur le corporal, la patène étant remisée sous le corporal, le prêtre se dirige avec le calice recouvert du linge appelé purificatoire vers le côté de l’autel qui pour l’assemblée des fidèles est à droite et qu’on nomme parfois côté de l’épître, parce que c’est de ce côté qu’est lu ce texte. Il essuie avec précaution la coupe du calice avant d’y déposer le vin qui a été amené par les servants de messe ainsi qu’un peu d’eau. Ce mélange demande qu’on s’y arrête. Pourquoi cet ajout d’un peu d’eau ?

   La première raison est que le vin dont s’est servi Jésus le soir du Jeudi-Saint était coupé d’un peu d’eau. Ainsi en usaient les Juifs dans le repas pascal. Ce fait est appuyé en outre sur le témoignage unanime des plus anciennes liturgies et des saints Pères (on appelle ainsi les anciens écrivains des débuts de l’Eglise dont l’autorité fait foi en de nombreux domaines.)

   L’autre raison (une deuxième) est donnée par la prière qui accompagne cette action. Cette prière rappelle que Dieu avait créé la nature humaine d’une manière admirable : rappelons-nous Adam et Eve avant leur péché - mais il l’a réformée d’une manière plus admirable encore en chargeant son Fils lui-même de cette restauration. « L’amour, la sagesse, la puissance de Dieu éclatent avec une splendeur incomparablement plus grande dans la rédemption que dans la création. » L’Eglise nous fait chanter dans l’Exsultet de la nuit pascale « nihil nobis nasci profuit, nisi redimi profuisset » Il nous eût été d’aucun profit de naître si nous n’avions eu celui d’être rachetés.

   Entre parenthèses, voilà de quoi rassurer ceux qui se demandent si c’est un bien que d’être apparu sur cette terre. Profiter de l’amour rédempteur du Christ ne peut se comparer à être resté dans le néant.

Or c’est bien cela que marque le mélange de l’eau et du vin. Le vin élément noble et précieux est le symbole de la divinité de Jésus - l’eau substance si mobile est le symbole de l’humanité fragile et inconstante. Or Notre Seigneur a voulu unir dans sa personne l’une et l’autre afin de nous permettre à nous d’être transformés : les gouttes d’eau versées dans le calice se perdent dans le vin, en prennent les propriétés. Ainsi du contact avec Jésus nous sommes pénétrés de sa grâce divine.

   Il est à remarquer d’ailleurs qu’avant de la faire tomber dans le calice, le prêtre bénit l’eau. Puisque cette eau est l’image des chrétiens elle a besoin de recevoir cette marque qui la relève alors que le vin n’a pas besoin de cette élévation puisqu’il représente NS qui par son union avec son peuple ne reçoit aucun bien mais plutôt le comble de tous dons.

   Il faudrait aussi noter une 3ème raison de ce mélange de l’eau et du vin. Dans la liturgie grecque quand le prêtre prépare les offrandes il transperce le pain d’un coup d’une petite lancette tandis qu’au même moment un diacre verse dans le calice le vin et l’eau en disant : Un des soldats lui transperça le côté de sa lance et aussitôt il en sortit du sang et de l’eau. Il y a donc là une référence à l’Evangile et la liturgie grecque pense à ce sang précieux symbolisé par le vin, et à l’eau qui coula du flanc transpercé du Sauveur.

   Ayant ainsi préparé le calice, le prêtre revient avec lui au milieu de l’autel pour en faire l’oblation. Il l’élève à la hauteur de ses yeux lesquels sont fixés pendant ce temps sur la Croix. Le prêtre ne fera plus ici mention de son indignité et au lieu de parler au singulier comme à l’oblation de l’hostie, il parle au pluriel « Nous vous offrons, Seigneur, le calice du salut » C’est qu’en effet, à présent, par ce fameux mélange de l’eau avec le vin, la communauté des fidèles est directement représentée.

Il offre le calice du salut. C’est comme nous l’avons vu pour l’hostie. Il y a anticipation. Le calice ne sera réellement celui du salut que lorsque le sang de Jésus y aura pris la place du vin. Mais le sacrifice est déjà engagé par l’oblation du calice et de l’hostie d’où l’importance de l’offertoire que nous avons signalée il ya quelques semaines.

   En offrant le calice le prêtre emploie une bien jolie expression quoique quelque peu mystérieuse. Il dit en effet que ce calice monte vers la divine majesté « cum odore suavitatis » avec une odeur de suavité. On hésite la plupart du temps à donner cette traduction mot à mot. On la remplace par exemple par « un parfum agréable » ou « d’agréable odeur ». Or cette expression est fréquente dans les textes bibliques et a été souvent reprise dans toutes les liturgies. Ainsi Noé, quand le déluge est terminé, et qu’il est sorti de l’Arche, s’empresse d’offrir un sacrifice à Dieu et le Seigneur dit le texte sentit une odeur de suavité et il dit : Je ne répandrai plus ma malédiction sur la terre. Il est bien évident que le sacrifice que nous préparons, que le sang du calice de la Divine Victime sera reçu avec encore plus de complaisance par le Seigneur ! Rien de plus suave que l’odeur de ce Sang du Sauveur qui afflue au Cœur de notre Seigneur.

   Le prêtre reposera alors le calice, comme il l’avait fait pour l’hostie, en traçant avec lui, au-dessus du corporal le signe de la Croix : c’est le même sang qui va couler sur l’autel qui jaillit autrefois sur la Croix des plaies du Sauveur.

   Voyez mes frères comme il y a matière à une profonde réflexion dans tous ces gestes, dans tous ces rites exécutés au cours de notre messe. Nous les gardons précieusement. A chaque messe faites-les vivre dans votre cœur ! Amen

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2 avril 2018 1 02 /04 /avril /2018 07:33

   Face aux religions et aux superstitions de toutes sortes qui déferlent sur notre Occident vieilli et fatigué, il est courant d’entendre des chrétiens s’interroger sur ce qu’ils sont. Sur leur identité, comme on dit - ou leur singularité ! Qu’est-ce qui distinguent les chrétiens de ceux qui ne le sont pas ?... Ce n’est évidemment pas qu’ils soient meilleurs que les autres. L’expérience n’apporte ici que de cruels démentis. On cherche alors dans les directions les plus diverses…Passionnés de justice sociale…Ceux qui aiment leurs frères…Mais d’autres ne poursuivent-ils pas aussi la justice et la paix ?...Les incroyants n’aiment-ils pas aussi ceux qui les aiment ?...

   On va souvent chercher bien loin ce qui se trouve tout près. La réponse est si simple qu’on n’y pense même pas. Peut-être justement parce que cette simplicité est redoutable et exigeante : le chrétien est tout simplement quelqu’un qui croit au Christ. On ose à peine formuler cette évidence. C’est pourtant une question que nous pouvons  nous poser avec gravité en ce matin de la Résurrection. Croyons-nous au Christ Jésus comme à quelqu’un de vivant ?... Non pas comme à quelqu’un qui a vécu autrefois - Napoléon ou Vercingétorix !-, mais comme à celui qui est en notre vie aussi présent et même plus - bien que d’une manière différente - que tous ces gens que nous fréquentons et dont nous savons bien qu’ils ne sont pas morts. Croyons-nous au Christ Jésus à la manière dont St Paul y croyait ?... A la manière dont Marie-Madeleine en parlait ?...

   Rappelez-vous ! Quand St Paul est amené à exposer devant le roi Agrippa les raisons de sa détention, le proconsul résume à l’intention du roi, ce qui est en question : « Il s’agit d’un certain Jésus qui est mort et que Paul affirme être vivant. » Oui, tout est là ! Le personnage qui est mort il y a vingt siècles, aucun historien sérieux ne doute aujourd’hui qu’il ait réellement existé. Mais il s’agit d’autre chose !... La foi commence quand on est capable d’assurer : non seulement il a existé, mais il est toujours vivant. Quand on et capable d’en parler avec ces accents de tendresse que sait trouver Paul quand il évoque « Jésus mon Seigneur ; celui qui m’a aimé et s’est livré pour moi. » Ah ! J’ai beau être un pauvre type, pas meilleur que les autres, je sais que cette certitude suffit à transfigurer une vie.

   Si le Christ est ressuscité, s’il est vivant, il est celui qui donne à ma vie son sens. Il est celui qui me redonne espérance et m’assure qu’à travers tout ce que je vis, tout ce qui se passe dans le monde, son amour est là présent et agissant. Ses voies ne sont pas les nôtres, mais il saura nous conduire au Dieu vivant, le Dieu et Père de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

 Ce Christ est celui dont nous trouvons l’écho dans les textes de la messe de Pâques. Le mot de Madeleine ne s’invente pas : « Il est vivant, le Christ, mon espérance. » Et elle court l’annoncer aux autres…

   Rappelez-vous encore le baptême renouvelé de cette nuit pascale : « Croyez-vous en Jésus-Christ le Fils unique de Dieu, qui est né de la Vierge Marie, qui a souffert la Passion, qui est mort et qui est ressuscité pour nous ? - Oui, nous croyons. » Sur la base de cette foi, oui, nous pouvons parler. Oui, nous pouvons être les témoins de Jésus-Christ. Comme hier l’ont été les saintes femmes et les apôtres.

   Si cette rencontre avec Jésus vivant s’est produite dans notre vie, nous aurons quelque chance d’en parler de manière crédible. Mais si Jésus n’est pour nous qu’un personnage du passé - ou pire, qu’une idée plus ou moins vague -, nous en parlerons peut-être comme des historiens ou des philosophes de la religion…Leur science et leur bonne volonté n’ont jamais converti personne. Et ce n’est pas leur rôle.

   Puissions-nous en ce jour de Pâques prier pour obtenir la grâce d’une rencontre de plus en plus profonde et vraie avec notre bien-aimé Frère et Seigneur Jésus ! Nous pourrons ainsi parler de lui de façon à ce que le monde croie. Amen, Alléluia !

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2 avril 2018 1 02 /04 /avril /2018 07:31

   Au centre de notre foi et de notre vie chrétiennes il y a la personne du Seigneur Jésus. Tout ce qu’il a dit et fait durant les trente années qu’il a vécues parmi nous a donc sa signification pour nous. Les trois derniers jours de sa vie terrestre ont pourtant une importance particulière. Nous avons beau y revenir chaque année et revivre avec le Christ pas à pas le mystère de notre salut, nous n’en finissons jamais d’en explorer la profondeur.

   Ce soir, nous recommençons à célébrer une nouvelle fois le mémorial de la passion du Seigneur. Par l’institution de l’eucharistie, Jésus réuni avec les siens autour de la table du repas pascal, anticipe ce qui va se produire le lendemain. Son corps percé sur la croix, son sang versé pour nous sont là désormais à notre disposition, comme le moyen qu’il nous laisse pour nous rassembler nous aussi autour de lui, en lui. Il est venu pour cela : rassembler dans l’unité les enfants de Dieu que le péché avait dispersés. Là où le péché et la haine séparent et désunissent, l’amour du Christ poussé à l’extrême rassemble et réunit.

   A défaut de pouvoir comprendre le mystère, nous savons bien tout cela. Nous le croyons. Mais il y a dans ce repas autre chose à quoi l’on pense trop peu. Il ya une autre façon encore d’approcher ce qui se passe dans cette célébration. C’est aussi le mystère d’une amitié et d’une présence. Mystère d’amitié, oui. Vous vous en souvenez : « Je ne vous appelle plus serviteurs ; je vous appelle amis »…Après avoir cheminé pendant près de trois ans sur les routes de Palestine avec les siens ; après avoir partagé avec eux la fatigue, la faim, la soif, les dangers de cette vie errante, Jésus a noué avec eux une relation qui n’est plus seulement celle d’un maître avec ses disciples, mais bien celle qu’on peut avoir avec ses plus proches. On sent dans les récits de la dernière Cène quelque chose de cette proximité. Comme si, parmi toutes les difficultés qu’il prévoit pour ces derniers jours, Jésus réalisait qu’il allait aussi devoir se séparer de ses amis. « J’ai désiré d’un grand désir manger cette Pâque avec vous »… De fait, il a pu craindre à un moment donné d’être capturé avant d’avoir pu réaliser ce vœu. Il s’en réjouit, mais il a aussi conscience que c’est la dernière fois. « Je vous le dis, je ne mangerai jamais plus cette Pâque avant qu’elle ne s’accomplisse dans le royaume de Dieu »…

   Se souvenir de cela aide à comprendre un peu mieux que l’eucharistie n’est  pas seulement la représentation du sacrifice de la Croix et de son œuvre de salut. C’est aussi le moyen qu’a trouvé Jésus de prolonger sa présence parmi nous. A ses amis -les siens-, dont on sent la peine qu’il a de les quitter, il laisse une dernière preuve d’amour. Il laisse le moyen de réactualiser sa présence parmi eux. Non pas seulement par le souvenir, comme nous le faisons pour des êtres aimés disparus. Mais bien dans la vérité que seule peut donner l’efficacité de l’agir divin ici à l’œuvre. Jésus nous laisse la possibilité de revivre encore aujourd’hui cette amitié en refaisant avec lui, présent parmi nous jusqu’à la fin des temps, les gestes mêmes qu’il a accomplis ce dernier soir. Ces gestes mêmes, nous les reprenons ce soir, car nous sommes, nous aussi, devenus ses amis, les « siens ». Le cœur de Dieu ne pouvait pas se satisfaire d’une poignée d’amis. Il lui fallait le monde entier.

   L’épisode des disciples d’Emmaüs - un des plus beaux du temps pascal - nous rappellera cela dans quelques jours. Jésus ressuscité marche avec eux un bon bout de chemin. Les deux hommes sont de bonne volonté, mais un peu naïfs. Ils s’imaginaient que Jésus allait aussitôt libérer Israël, inaugurer le royaume de Dieu… Au lieu de cela il est mort crucifié. Comment ne seraient-ils pas profondément déconcertés ?... Jésus reprend donc les Ecritures et leur montre qu’on n’entre pas si facilement dans le Royaume : « Ne fallait-il pas que le Christ endurât ces souffrances pour entrer dans la gloire ?... » Il faut penser surtout à la fin de l’épisode. Les deux hommes ont repris courage, mais ils ont encore besoin d’une présence amie : « Le soir tombe et le jour touche déjà à sa fin, reste avec nous, Seigneur ! »…

Reste avec nous ! Le souhait de la constante présence de l’ami…Jésus procède alors à la fraction du pain…Il disparaît, mais il leur laisse le sacrement de sa présence - celui que nous célébrons ce soir. Notre cœur n’est-il pas encore tout brûlant au-dedans de nous quand il nous parle en chemin ?...

 L’eucharistie est bien le sacrement de l’amitié et de la présence de l’Ami. Il ne suffit pourtant pas de le savoir. Ni même d’y croire ! L’amitié est une relation mutuelle. L’Ami quant à lui est toujours là, jusqu’à la fin des temps. Il nous l’a dit et nous en sommes sûrs dans la foi. Mais sommes-nous présents à notre Ami ?... L’amour même qu’il nous porte est une provocation intime permanente. « Pierre, m’aimes-tu ? »… Comme Pierre, il nous faut apprendre à répéter notre réponse. Jusqu’à en être triste -comme Pierre l’a été !... Chaque nouvelle interrogation de Jésus nous fait découvrir que notre amour n’est pas encore tout à fait celui qui est attendu. Il n’y a pas seulement l’amour aisé des jours heureux. Il y a aussi l’amour coûteux des jours difficiles. Il nous faut nous aussi passer par bien des tribulations pour entrer dans le royaume de Dieu…

   La célébration de la Cène au seuil des trois jours saints nous rappelle aussi cela. Nous pouvons donc faire nôtre la prière des deux disciples. Le jour déjà touche à sa fin. Reste avec nous, Seigneur. Et que nos yeux sachent te reconnaître. Amen !

 

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